Interview de Mai 2015 : 4 ème partie
Voici la quatrième partie d'une interview réalisée devant caméra en vue de la constitution d'un site qui n'a pas vu (encore ?) le jour et qui devait s'intituler : "Du sentiment de Manque à la Plénitude". La Première partie a été posté le 28 Septembre 2018. La partie vidéo ayant été détériorée, ceci est une restranscription écrite de cette interview qui devait présenter un site exposant des Jeux de Révélation en direct pour inviter les personnes en recherche spirituelle à se mettre eux-mêmes en jeu et à nu et, ainsi découvrir leur vraie nature. Quelques vidéos s'intitulant "Du Sentiment de Manque à la Plénitude" sont visionnables sur la chaîne you tube. Comme elle est un peu longue, je me vous la partage sur le blog en plusieurs parties, le temps d'en terminer la retranscription de l'audio. Je l'ai retrouvé il y a peu et, me suis demandé si cela pouvait être d'une quelconque utilité. Vous me direz ? Ou pas. Je remercie chaleureusement l'amie de longue date qui a bien voulu se prêter au jeu de l'intervieweuse mais qui au final, préfère rester anonyme.
Q : Justement puisque je vois nous
sommes déjà entrés dans le vif du sujet, je crois que l’on peut maintenant
parler de l’objet particulier de notre rencontre aujourd’hui.
R :
Oui. On a fait un sacré détour-là.
Q : Un détour sacré, si tu veux. Mais c’était peut-être
nécessaire de te présenter un peu toi, ton parcours pour le grand public, mais
aussi l’originalité de ton approche avant d’entrer en matière ? Présenter
un site sur des jeux de révélation comme ça à brûle-pourpoint sans introduction
aurait certainement laissé beaucoup de perplexité.
R :
Probablement.
Q : Alors, là je vais lire un peu ce
que j’ai préparé. Donc. Tu mets en ligne un site gratuit qui s’appelle “Du
sentiment de manque à la plénitude”. On y voit une mosaïque de visages
différents. Chaque visage représente un accompagnement individualisé d’une
personne depuis son sentiment de manque à la plénitude. Pour y avoir joué
moi-même à plusieurs reprises avec toi, je confirme qu’à chaque fois j’ai
découvert avec étonnement, ce même espace de non savoir dont tu parles.
C’est vrai que c’est un changement radical
de perspective. Au départ du jeu, tu sembles englué dans une sorte de cercle
vicieux mental et de frustration dont il semble impossible de se libérer par la
pensée. Puis, en se mettant en jeu et en répondant systématiquement aux questions pourquoi, pourquoi, pourquoi, on arrive à un
espace où il n’y a plus de réponses, ni de questions d’ailleurs : Le
fameux “je ne sais pas”. Dans cet espace de non-savoir, assez curieusement, on ne ressent plus aucun manque. Il y
a à la fois une absence de repères et une grande intensité de Présence. Une
paix et une joie. Pour certaines personnes, ça libère des émotions enfouies.
Pour moi, c’est comme si je remettais les compteurs de ma vie à zéro. Ça a généré de magnifques prises de conscience et à chaque fois une énergie et une plénitude incroyables.
R :
Oui. L’espace de non savoir révèle la plénitude que nous sommes.
Q : À chaque fois j’ai connecté avec
cette joie qui vient de l’intérieur, d’un changement radical de conscience. Tu
vois, en lisant Ekhart Tolle, il y a de nombreuses années, « Le pouvoir du
moment présent » - tu connais je suppose - j’ai eu le pressentiment de cette
Présence. Mais en jouant à ce jeu avec toi, j’y ai vraiment goûté.
R :
On ne se rassasie pas avec le menu, c’est sûr. Rien n’a plus de valeur que de
le vivre vraiment. Et, la révélation par contraste est très puissante.
Q : Par contraste ?
R : Oui, ce passage en très peu de temps d'un sentiment de manque à la plénitude, et de l'impression de savoir au non savoir, de la tension à la détente.
Q : Peut-être pourrais–tu expliciter
un peu plus concrètement ce jeu pour que les spectateurs le comprennent bien ?
R : Un
Jeu de Révélation est une sorte de déconstruction de la boucle
auto-référentielle du moi séparé illusoire. Il démonte le mécanisme du manque ou de la
souffrance en révélant qu’il s’appuie sur des croyances ou des savoirs erronés,
qui eux-mêmes s’enracinent, en réalité, et après investigation, dans un espace
de non-savoir où tout va bien depuis toujours.
C’est
un jeu qui fait intervenir un accompagnant et un accompagné. Avant de commencer
à jouer, il s’agit de mettre en évidence un sentiment de manque chez
l’accompagné, une sorte de dissonance dans sa vie, une expérience qu’il
préfèrerait changer.
C'est un simple constat de ce qui semble se vivre. Or, s'il y a un sentiment de manque, c'est que de toute évidence, vous ne réalisez pas que vous êtes déjà le Soi. C'est que vous ne réalisez pas que Vous êtes le Sans Forme se manifestant en tant que tout l'univers. S'il y a une manifestation (expérience, perception, état d'être, forme etc...) à laquelle vous résistez, c'est que quelque part, vous êtes ignorant de votre vraie nature. C'est que vous ne réalisez pas que vous êtes déjà le Sans Forme se manifestant en tant que tout ceci à chaque instant.
Je
pose souvent la question, « tout irait très bien si
seulement ? ». Et, s’il y a une réponse à cette question, c’est que
la personne croit sincèrement qu’il lui manque quelque chose pour être pleinement
heureuse ici et maintenant.
C’est
la réponse à cette question, qui est une simple croyance, que l’on va ensuite
investiguer pour savoir si elle est ultimement vraie.
On va
donc explorer la réalité apparente de ce sentiment de manque et toutes les
fausses croyances qui le soutiennent et semblent le valider, jusqu’à ce qu’il
révèle sa véritable source : le non-savoir, qui est plénitude. Extraordinaire
paradoxe. Non ?
Q : Oui, d’ailleurs le mental est
complètement piégé. C’est assez extraordinaire.
R :
On part donc d’un sentiment de manque chez l’accompagné et l’accompagnateur
pose la question “pourquoi”. L’accompagné répond de la façon la plus brève et
honnête possible. Tant qu’une réponse est fournie par l’accompagné, c’est le
signe que l’accompagné prétend encore savoir pourquoi. Le guide repose alors
simplement la question pourquoi.
À un
moment donné, si l’accompagné fait preuve d’un minimum de maturité et
d’honnêteté, il est inéluctable qu’un “je ne sais pas” survienne. Si ce “je ne
sais pas” est un “je ne sais pas” sincère, un basculement a lieu. L’accompagné
passe du mode “penser la vie” au mode “sentir la vie”. C’est un point
d’orgue de silence et d’étonnement.
À ce
moment-là, l’accompagné est invité à explorer la nature véritable de cet espace
de non savoir qui est Présence consciente. Et, de découvrir que c’est cela sa
véritable nature et non pas les divers savoirs, croyances ou identités qui ne
font que naître et se dissoudre au sein de cet espace de non-savoir.
En explorant cet Espace de non-savoir, il est réalisé qu'il ne possède rien, ne veut rien, ne sait rien, et qu'il rayonne d'une paix et d'une plénitude qui ne dépendent d'aucune réalité extérieure.
Q : Tu m’avais expliqué cela à partir
de la métaphore de l’arbre et j’avais trouvé ça très parlant. Tu pourrais
peut-être le refaire ?
R : Ok,
si tu veux. (Un petit Ficus - arbrisseau - est saisi pour la démonstration). L’arborescence de
l’arbre symbolise l’arborescence de notre système de croyances. Lorsqu’on
explore une croyance quelle qu’elle soit, on se rend compte qu’elle semble
toujours soutenue et validée par d’autres croyances qui, elles-mêmes semblent
soutenues et validées par d’autres croyances encore. Cela semble être un jeu de
miroirs à l’infini, une forteresse impénétrable. Peut-être est-ce la raison
pour laquelle si peu d’êtres la remettent en question ? En réalité il n’en
est rien.
Si
l’on prend le temps de considérer une croyance à la fois et que l’on l’examine
de façon directe et authentique, la soi-disant chaîne de causalité qui semble
la justifier, on va s’apercevoir qu’elle repose en réalité ... sur du vent !
On
peut partir de n’importe quelle feuille (prétention à avoir) sur cet arbre pour remonter à
rebours jusqu’à la racine commune de tous les savoirs et on va fatalement tomber nez à nez avec un espace de non-savoir. Car au fond, même si je fais semblant et si tout le monde fait tout le temps comme si, je ne sais rien.
Ramana Maharshi disait d'ailleurs :"Vous savez que vous ne savez rien : découvrez la nature de ce savoir."
Ici,
(pointant vers une feuille particulière de l’arbrisseau) ça va être la croyance
: “je n’ai pas confiance en moi”, ici, “j’expérimente une angoisse”, ici, “j’ai
peur que mon fils se suicide”, ou “je suis trop vieux”, ou « je n’y arrive
pas”, ou “j’ai peur de manquer d’argent”, ou “ça ne devrait pas exister”….
À
chaque question “pourquoi”, je remonte à rebours d’un cran vers la racine, de
branche en branche, je remonte à rebours vers le non savoir qui est le Maintenant éternel, que je
n’ai jamais cessé d’être.
Cet
espace de non-savoir est en général voilé par la volonté d’avoir raison ou de
maintenir l’illusion du contrôle de sa vie par une entité inexistante, et
surtout par la croyance en un moi séparé, doté de libre arbitre.
On
va découvrir que le mental ordinaire est programmé de façon automatique pour
donner des réponses, programmé pour faire “comme si”, programmé pour toujours
donner un sentiment de fausse sécurité cognitive et affective. Le mental est en quelque sorte programmé pour donner
l’illusion d’un univers stable et prédictible.
Ce jeu
fonctionne comme un Koan qui fait bugger le mental.
Lorsque
le mental réalise sa propre impuissance à donner une réponse définitivement vraie, absolument vraie, il vacille sur ses bases et il s’effondre. Cette dissolution révèle aussitôt l'espace de non savoir, dont il est issu et, auquel il retourne toujours. Le non
savoir est simplement notre état naturel quand nous arrêtons de faire semblant de savoir.
Si
le “je ne sais pas” n’est pas un véritable je ne sais pas, on continue simplement
à jouer et à poser la question “pourquoi” jusqu’à ce qu’un “je ne sais pas”
définitif se révèle.
Q : Tu pourrais juste préciser pour nos spectateurs
ce que c’est qu’un “je ne sais pas” non véritable ?
R : C’est
un “je ne sais pas” sans la paix et la plénitude qui vont avec. L’accompagné va
prononcer les paroles “je ne sais pas” dans un acte désespéré de garder la
face, mais par en-dessous, ça continue à chercher. La stratégie du moi séparé, c’est
de garder le contrôle à tout prix. Comment ? En continuant à donner des pseudo
réponses. Comme tu l’as vu dans les accompagnements vidéo, le mental répond
parfois à des choses incroyables. C’est là que l’on se rend compte à quel point, le mental est prétentieux, à quel point on s’illusionne sur notre capacité à contrôler
la vie, à savoir ce qui est bien ou mal, juste ou injuste, faux et vrai.
Lorsqu’un
faux “je ne sais pas” est découvert – et, cela se lit dans le visage, le regard
et le timbre de voix de l’accompagné - on reprend simplement le questionnement
à partir de la réponse de l’accompagné ou de ce qu’il vit dans l’instant. Un faux "je ne sais pas" est
un « je ne sais pas » sans saveur, sans parfum, sans paix, sans
amour.
Le véritable « je ne sais pas » n’est pas un état neutre,
c’est un vide qui contient toute chose, un vide vibrant d’amour, c’est une
plénitude.
Q : Tu insistes beaucoup sur le fait de te regarder ?
R : Oui. En Inde on appelle ça le Darshan. Un être installé dans la Présence non duelle la transmet sans rien faire par sa propre Présence, par osmose comme le disait Ramana Maharshi. La flamme de l'attention impersonnelle éveille l'attention impersonelle. La Présence est hautement contagieuse.
On
peut découvrir que, lorsque le regard de l’accompagnant est fuyant, cela
dénote presque toujours une stratégie pour éviter d’être vu, pour continuer à
garder le masque de celui qui prétend savoir, pour continuer à jouer, à faire
comme si.
C’est
pour cela que je propose toujours de faire ce jeu dans le regard de
l’accompagnant, à partir de la vision sans tête et dans le “face à espace”.
Q : Ah ben justement. Dans tes rencontres, tu proposes
souvent des exercices tirés de l’enseignement de Douglas Harding. “Face à
espace” : Voilà un terme qui mériterait sans doute une petite explication.
R : Parmi
les nombreux jeux que je propose, je partage effectivement un certain nombre de
pratiques issues de l’enseignement de Douglas Harding. Les pratiques de Douglas Harding sont des créations vraiment géniales qui résument à merveille 6000 ans de spiritualité authentique. Ils sont basés sur le retournement à 180 degrés de l'attention vers la source de la perception. Ils fonctionnent pour la grande majorité à partir du sens de la vue, mais pas seulement.
Comme le sens de la vue nous accompagne du lever au coucher, on peut dire que c'est une méditation vivante et incarnée à laquelle, ils nous convient. De plus les perceptions visuelles génèrent énormément de jugements. Beaucoup plus que les autres perceptions. C'est donc très difficile de se déconditionner par le regard par rapport aux autres sens moins liés au mental. Sauf qu'avec les pratiques proposées par Douglas Harding l'éveil à sa vraie nature devient d'une simplicité étonnante.
Q : C'est le premier à avoir fait ça ?
R : Oui. C'est une vraie invention dans l'histoire de la pédagogie non duelle. L'enseignement qui permet de déconstruire notre mode de perception duel.
Par
exemple, contrairement à ce que croit la plupart des gens, en réalité, on n’est
jamais face à face. Comme nous pouvons l’expérimenter immédiatement, contrairement
à ce que l’on nous a dit, si tu laisses de côtés tes croyances, et tes pensées, si tu es vraiment attentive, tout ce qui apparaît visuellement à
toi dans l’instant n’est pas perçu par une tête et deux petits yeux, mais par un
immense espace ouvert, transparent et conscient au-dessus de tes épaules.
En
tournant l’attention directement vers la source de la perception visuelle en
toi, maintenant, trouves-tu un visage ? (L'index est tourné en direction de la tête)
(Long
silence)
Tu
réalises cette absence de tête ? C’est évident pour toi maintenant ?
(Immense sourire de l'amie journanliste)
Nous
n’avons jamais rencontré le monde qu’à partir d’un espace ouvert et conscient
au-dessus de nos épaules.
Q : En effet, je ne vois pas ma propre tête, il
y un espace. C'est étonnant. Mais ça change quoi ça dans ma vie de voir le monde ainsi ?
Si
tu réalises que Tu es l’espace ouvert et conscient qui accueille en son sein le
monde, la croyance en un moi personnel qui perçoit le monde s’effondre. Et, si tu
demeures longuement dans cet espace que tu es déjà, tu vas être amené à
reconnaître qu’il n’y a nulle distance entre Toi en tant que cet Espace vide et
les perceptions, c’est à dire le monde. Le monde apparaît toujours à 0 cm de
cet espace transparent. Toute perception, (les sensations et les pensées aussi)
apparaît toujours à 0 cm de Toi.
Tu
reconnais que tout est Conscience. C’est l’expérience la plus bouleversante
qu’un être humain puisse faire.
Comme
le disait Nisargadatta : Voir que je ne suis rien c’est la sagesse, voir
que je suis tout c’est l’amour. Entre les deux ma vie s’écoule.
Mais
il faudrait sans doute prendre le temps de refaire l’expérience plusieurs fois et
prendre le temps de la goûter vraiment.
Q : Oui, je vois un peu ce que tu veux
dire. J’ai déjà eu un déclic avec toi en faisant une expérience de la Vision
Sas Tête. Mais il faudrait sans doute que je prenne plus le temps. Que j’approfondisse
cette première intuition. Mais j’entraperçois une sorte d’évidence dont je
n’avais pas conscience.
R : Je
t’invites aussi à réaliser que la pensée “je vois” ne voit rien par elle-même.
Elle est perçue mais ne perçoit rien. La pensée ”je vois” ne fait qu’apparaître
au sein de cet espace vacant et conscient. La personne qui n’est qu’une pensée
crue ne voit jamais rien. Elle est perçue. Mais elle-même ne perçoit rien.
Q : Oui, ça ça change tout.
R : L’acte de
perception précède l’idée même de la personne. Et, il en est ainsi pour toutes
les perceptions. Entendre entend avant que la croyance "j’entends" apparaisse. Ressentir
ressent avant que la pensée « je ressens » ne naisse. La pensée pense
et l’acte se fait, avant que je m’en attribue le mérite ou la faute. Etcetera.
Si
l’on applique la Vision Sans Tête au jeu de révélation auquel on joue ici, « Du
Sentiment de Manque à la Plénitude », ça signifie que : tant que
l’interlocuteur veut faire comme s’il avait un visage et donc une personnalité,
c’est qu’il a un ensemble de savoirs à défendre, une histoire à promouvoir, etcetera,
et le jeu continue.
Croire
que je vois le monde à travers deux petits yeux (mimé avec les deux pouces et les
deux index qui se joignent pour former un cercle à 30 cm de chaque œil) est une
façon mentale de m’objectiver, de me penser comme une chose au sein du monde,
une troisième personne ; c’est la perspective duelle.
La
perspective absolument vraie est de réaliser que dans l’instant je ne vois
pas ma propre tête. Alors le monde apparaît en moi. Krishnamurti disait souvent
« Je suis le monde ». Mais en faisant l’expérience de Douglas Harding
de la Vision Sans Tête, tu l’expérimentes vraiment.
Q : C'est la même chose alors ? Un Jeu de Révélation et la Vision Sans Tête ?
R : La
plupart des jeux de Douglas partent de l’acte de perception visuelle. Le jeu
présenté ici : "du sentiment de manque à la plénitude" part de nos pseudo
savoirs, de nos croyances, de notre sentiment de séparation.
Les
deux révèlent le même espace impersonnel, la même plénitude de Présence
consciente au cœur de chacun de nous.
Car
cet espace de non-savoir qui se révèle ce n’est rien d’autre que ma véritable
nature.
Dans
le “je ne sais pas”, c’est l’évidence d’être qui se révèle, le “Je Suis”, la
Présence consciente, sans forme, sans âge, sans dimensions et sans limites.
C’est
dans l’absence de moi que la véritable Présence se révèle.
Q : C’est un paradoxe extraordinaire. C’est comme
un grand étonnement ! Que pouvons nous faire de ça ?
R : Hégel
disait que l’état le plus sublime de l’homme était l’étonnement, mais que le
problème de l’adulte face à l’étonnement était qu’il était comme l’enfant qui
se voyait dans un miroir pour la première fois et, qui le retourne aussitôt
pour savoir ce qu’il y a derrière. Dès que l’on cherche à saisir, à expliquer à
comprendre, on repart dans le cercle vicieux d’une recherche sans fin, on
repart dans un futur qui n’existe pas.
Q : Comment t’es venue l’idée de partager ces
vidéos du sentiment de manque à la plénitude ?
R : Je
ne sais pas. L’envie de filmer, cela résonne avec la beauté de l’éclosion
impersonnelle. D’un visage gagné par le mystère. La beauté de la Métanoïa.
Il y
a un film merveilleux de Dreyer que tu dois absolument voir, dont la dernière scène montre l’émerveillement d’un visage de femme gagnée par la lumière.
Q : Ah oui, lequel ?
R : « Ordet »
qui en danois signifie la Parole.
Q : Je n’en avais jamais entendu
parler.
R : Ce
film est un pur chef d’œuvre. Il parle de la foi au-delà des images
conventionnelles. De la foi véritable qui transcende les religions et la
multiplicité des voies. De la foi authentique des mystiques qui réconcilie les hommes et leur fait voir
l’unité en-deçà des schismes religieux et des idéologies partisanes. Chaque
image de ce film est pure vibration.
À la
fin du film, il y a une sorte de miracle incroyable qui a lieu et une sorte de
réveil à la foi de Mikkel qui l’avait perdue. Il dit alors à sa femme
Inger : Maintenant commence pour nous une nouvelle vie. Et Inger lui
réponds avec une douceur d’outre–ciel et un visage transfiguré par la lumière :
« Ja,
livet, livet… Livet »
Ce
qui en danois, signifie. Oui La vie, la vie… La vie…
Q : Que c’est beau !
R : Rien
que d’en parler, cela me donne des frissons. Car au fond il n’y a que ça et il
n’y a jamais eu que ça. La Vie une qui vit au travers de ces corps et de ces
formes.
Un
Jeu de Révélation permet à chacun de vivre cette transfiguration, cette
transsubstantiation au cœur de cette vie-ci. C’est une perche tendue vers
l’humain qui semble perdu dans son rêve - qui souvent tourne au cauchemar. Une
perche pour l’inviter à s’éveiller à la lumière atemporelle.
Ce
qui m’a certainement également inspiré ce projet c’est sans doute la beauté des
centaines d’éclosions impersonnelles que j’ai eu la chance d’accompagner depuis
1998 en tant que thérapeute psychocorporel, puis en accompagnement non-duel
depuis 2012.
Ces
centaines de visages tout d’un coup éclairés par la lumière de la Conscience. Il
n’y a rien de plus beau et de plus émouvant que ces éclosions lumineuses.
Q : Cela me fait penser au titre de ton blog :
éclore-en-conscience.
Mais c’est aussi le titre de ton album de
chansons : ÉCLOSIONS ! Et de tes stages. Il semble que ce mot te poursuit ?
R : L’éclosion
du Soi fait évidemment écho à la disparition de toute intentionnalité. Le mot
nirvana en sanscrit signifie extinction. L’extinction de l’illusion d’être un
moi séparé, la dissolution de l’égo. C’est cette extinction qui semble faire
éclore la lumière sous-jacente et omniprésente qui est notre vraie nature et, qui se révèle parfois dans un regard lorsque la personne est désencombrée de
toute identification.
Mais
cette expression peut aussi induire en erreur, car le Soi est déjà là et n’a
pas à s’effleurir.
Q : En tous cas, ces transfigurations
sont très évidentes sur les vidéos effectivement. Surtout avec le gros plan sur
le visage de la personne accompagnée. On voit le lien entre le moment où le
« je ne sais pas » authentique apparait et la lumière qui transfigure
le visage.
R : J’ai
voulu partager par vidéo afin que ceux qui sont en recherche ou qui
expérimentent le manque dans leur vie réalisent que c’est beaucoup plus simple
et accessible qu’on le dit bien souvent. Tu n’as pas forcément besoin de faire
des pratiques, des rituels, chanter des mantras, t’assoir pour méditer une
heure par jour, pratiquer le yoga ou avoir des connaissances ésotériques. Tout
cela peut être très intéressant et je ne déconseille nullement les pratiques, ou
la lecture des textes mais cela ne concerne pas forcément la réalisation de
votre nature véritable.
Tu dois
juste avoir l’honnêteté de remettre tes croyances en question. Mais pas qu’un
peu. Jusqu’au bout.
Ce
jeu pointe vers une grande simplicité, vers un dénuement, vers un abandon, vers
l’humilité dont parle Maitre Eckhart lorsqu’il dit : Je ne possèdes rien,
je ne veux rien, je ne sais rien. Dans le sermon de la pauvreté en esprit.
On
nous a appris qu’il fallait toujours tout savoir, tout connaître. Mais ici on pointe
vers la beauté du non-savoir. Le mental a été surentrainé pour donner des
réponses. On ne nous a pas appris « à ne pas comprendre ». On a assimilé
le non-savoir à de l’ignorance. On fait “comme si” pour ne pas avoir l’air trop
idiot et on a voilé notre véritable beauté, notre innocence, notre créativité,
notre regard d’enfant.
Ici
on revient au non-savoir, le Maintenant éternel, le lieu sans lieu où éclot
l’étonnement. Et l’étonnement culmine toujours dans l’étonnement d’être. Dans
l’évangile de St Thomas, Jésus dit : « Heureux celui qui était déjà
avant d’exister. »
Je
trouvais également beau de partager avec le grand public l’intimité d’un visage
qui passe de la contraction à l’ouverture. Le sentiment de manque se lit dans
le regard. La plénitude également. Tous ces êtres finissent par nous offrir un
darshan du regard.
Une
étreinte par le regard. Qu’y a-t-il de plus beau qu’un regard sans personne dans
lequel tu disparais ? Qu’y a-t-il de plus beau qu’un regard éveillé, un regard
animé par la lumière de la présence consciente ?
Ce
regard impersonnel empli de lumière de compassion n’est pas celui du maître ou
d’une personne particulièrement charismatique. Il est notre regard naturel
lorsque celui-ci est désencombré de tout savoir, de toute intentionnalité, de
toute trace de volonté personnelle.
Q : En visionnant les différentes
vidéos, on se rend compte également à quel point nous, les humains, nous
fonctionnons tous de la même façon.
R : Oui.
Tu as raison de souligner ça. N’est-ce pas émerveillant que de reconnaître
cela ?
Au
départ les croyances sont en apparence assez personnelles, puis très vite, au
fur et à mesure que l’on remonte à rebours l’arborescence des croyances, tu
découvres qu’elles sont de plus en plus universelles. La croyance racine étant
« je suis un individu séparé du monde et des autres".
Mais
ce qui se révèle lorsque le mental abdique dans sa quête de contrôle, c’est un
espace de non-savoir qui est également ce non lieu où notre nature véritable à
chacun d’entre nous peut se révéler. La joie sans objet et la paix
inconditionnée qui en sont les caractéristiques sont également universelles.
N’est-ce pas au fond, la seule « non chose » que nous puissions réellement
partager ?
Ces vidéos
sont une invitation pour chaque spectateur à mettre en jeu ses propres
croyances et savoirs, même ceux qui semblent les plus évidents pour découvrir
sa véritable nature qui se révèle dans l’humilité du non-savoir. Une humilité
sans personne de humble. Il y a une profondeur abyssale dans le non savoir. Une
profondeur oubliée.
J’en
profite pour remercier tous ces êtres magnifiques qui ont accepté de jouer à ce
jeu avec autant d’authenticité et de se mettre à nu devant la camera. Ils nous
offrent ici un témoignage très direct des divers aspects de la souffrance
humaine et des mécanismes qui nous maintiennent enfermés dans la souffrance. Surtout, ils nous montrent que cette souffrance n’est pas réelle et qu’il y a une autre
façon de vivre : à partir de l’espace d’inconnaissance et de plénitude. À partir de notre vraie nature.
Nota Bene : Pour ceux qui sont intéressés par un accompagnement individuel non-duel à Paris ou par Skype ou une séance d'accompagnement psycho-corporelle pour laisser éclore les émotions bloquées, veuillez me contacter au 06 63 76 90 81 ou sur mon mail : adnnn1967@gmail.com
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