Hallaj et la poésie de l'Un
Hussein Mansour Al-HALLAJ (857-922), l'un des plus grands poètes mystiques de tous les temps, célébrait dans sa poésie l'unité avec le divin, l'Un que nous sommes.
Husayn Mansour Hallâj est né en 244 de l'ère musulmane (857) à Beïza, centre très arabisé dans la province perse d'Ahwâz. Son père était cardeur. Son premier maître en mystique fut Sahl de Tustar, puis, à vingt ans, il reçut du grand maître 'Amr Makki, l'habit monastique de sûfi à Basra. Il se maria dans le même temps et eut quatre enfants. Sa belle famille avait des accointances shî'ites extrémistes (zanj) qui le firent suspecter, bien qu'il fût rigoureusement sunnite. Après un premier hajj d'un an à la Mecque, il commença sa première prédication publique en Ahwâz, en rejetant l'habit sûfi, puis il poursuivit sa prédication en Khurâsân. Au bout de cinq ans, il vint s'installer avec sa famille à Bagdad. Après un second pèlerinage, il repartit pour un second grand voyage jusqu'à l'Indus et en revint pour son troisième et dernier pèlerinage (vers l'an 290/902). Revenu à Bagdad, il commença à tenir en public des discours surprenants qui provoqueront une grande émotion populaire. Il fut dénoncé par le poète sunnite zahirite Ibn Dawud, qui demanda sa condamnation à mort. D'abord acquitté, Il fut ensuite à nouveau menacé par le vizir shî'ite Ibn al Fûrat. Quatre disciples sont arrêtés mais lui-même s'échappe et se cache à Suse en Ahwâz, où il sera arrêté et ramené à Bagdad. Son interminable procès de neuf ans, soumis aux retournements du pouvoir, commence alors. En 301/913, un nouveau vizir, prohallagien, Ibn Isâ, fait avorter le procès et soustrait le cas de Hallâj à la compétence du cadi. Hallâj est interné au Palais mais il est autorisé à prêcher aux détenus et il est introduit auprès du khalife. Mais en 306/919, le vizir Hâmad fait rouvrir son procès. Tirant argument de la doctrine de Hallâj sur le remplacement votif du hajj, le cadi prononce la formule : "il est licite de verser ton sang", approuvé par 24 membres du tribunal canoniste. Deux jours après, le 27 mars 922 (309), Hallâj est exhibé au gibet et le lendemain intercis et décapité. Son tronc fut incinéré et ses cendres jetées dans le Tigre. La tête fut gardée par la Reine-mère - qui lui était favorable - au "trésor des têtes" du Palais, avant d'être envoyée en Khurâsân. C'était le premier martyre d'un mystique en Islam.
Heidegger disait que l'unité entre la poésie et la pensée ne peut se produire que si la poésie est sublime et la pensée profonde.
Voici quelques unes de ses fulgurances les plus incandescentes :
"Quelle terre est vide de Toi
Pour qu'on s'élance à te chercher au ciel ?
Tu les vois qui Te regardent au grand jour
Mais aveugles ils ne voient pas" (trad. Sami-Ali, Actes Sud)
"Ton esprit se mêla à mon esprit
Comme l'ambre au musc odorant
Qu'une chose Te touche, elle me touche
Car Toi c'est moi inséparablement" (Sami-Ali)
"Aïe ! Toi ou moi ? Voici deux dieux !
Loin de moi, loin de moi l'affirmation de deux
A jamais mon non-être est pour Toi un être
Et mon tout est en tout équivoque au visage double
Où donc est Ton être là où je regarde ?
Car déjà mon être est là où il n'y a pas "où"
Et où est Ton visage que je cherche du regard ?
Dans la vision du cœur ? Dans la vision de l'œil ?
Entre Toi et moi, un moi est de trop
Que la séparation cesse et que le Toi ravisse le moi !"
(Sami-Ali, Actes Sud)
"Nous sommes deux esprits infondus en un (seul) corps / Aussi me voir c'est Le voir et Le voir c'est nous voir" (Tawâsin)
"Ton image est dans mon oeil, ton invocation dans ma bouche. / Tu demeures dans mon coeur. Où donc peux-tu être absent ? (Yatîma I, traduction Sami-Ali).
"Avec l'oeil du coeur, je vis mon Seigneur. / Et Lui dis: qui es Tu? Il me dit: Toi" (muqatta’a 10)
"Et maintenant je suis Toi-même, / Ton existence c'est la mienne et c'est aussi mon vouloir" (muqatta’a 15)
"Tu demeures dans mon coeur et il contient le mystère de Toi. / Que la demeure se réjouisse et que se réjouisse le voisin! / Il ne contient aucun mystère que je connaisse sauf Toi / Regarde avec Ton oeil: y a-t-il un autre dans la demeure? / Que la nuit de la séparation s'allonge ou s'écourte / L'espoir et le souvenir de Lui me tiennent compagnie. / Ma perte me convient qui Te convient, ô mon Tueur / Et je choisis ce que Tu choisis" (muqatta’a, 23, traduction Sami-Ali).
"J'ai étreint, de tout mon être, tout Ton amour, ô ma Sainteté! / Tu me mets à nu, tant, que je sens que c'est Toi en moi..." (muqatta’a 30)
"Son esprit est mon esprit et mon esprit Son esprit; / Qu'Il veuille, et je veux; que je veuille, Il veut" (muqatta’a 32).
"Ton esprit s'est emmêlé à mon esprit / Tout ainsi que s'allie le vin avec l'eau pure / Aussi qu'une chose Te touche, elle me touche! / Ainsi donc Toi c'est moi, en tout!" (muqatta’a 47)
Et le verset le plus célèbre: "Unifie moi, ô mon Unique (en Toi) / En me faisant vraiment confesser que Dieu est Un / Par un acte où aucun chemin ne serve de route! / Je suis vérité en puissance, et comme la Vérité en acte (al Haqq) est son propre potentiel, / Que notre séparation ne soit plus!... (muqatta’a 39)
Si ce verset est le plus célèbre c'est peut-être aussi parce qu'en disant "Ana al haqq" ("Je suis la Vérité"), en revendiquant juste son droit de naissance, sa véritable nature, celle que chaque être humain peut re dé couvrir en lui-même, il a été condamné à mort pour blasphème, comme Marguerite Porete, le Christ et tant d'autres.
Les religions et les sectes de tout poil ne veulent surtout pas que vous réalisiez la Vérité de votre être atemporel et impersonnel. Elles n'auraient plus de subsides ni de fidèles et leurs caisses seraient vides. Il n'y aurait plus personne à confesser, plus personne à contrôler. Pensez donc au rachat des "pardon" au moyen-âge !
Il leur faut inexorablement continuer à entretenir la peur, et la révérence à un Dieu séparé de l'homme, inatteignable, purement transcendant et non pas immanent, à renforcer les histoires, à régenter vos vies, à durcir vos croyances qui rendent les dévôts fanatiques, afin de vous maintenir dans l'Espoir, qui émousse la sensibilité des êtres à leur êtreté.
Maître Eckhart, théologien et mystique chrétien du moyen-âge, nous conviait au même festin, celui de l'Un en disant :
L"œil par lequel je vois Dieu et l'œil par lequel Die me voit est un seul et même œil, une seule et même vision, une seule et même connaissance, un seul et même Amour."
Je vous souhaite de tout cœur de réaliser la Vérité et l'inséparabilité de votre être !
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