La Connaissance authentique est une Co Naissance
L'essence d'une spiritualité traditionnelle et authentique est un "chemin sans chemin à la trace du désert" (Maître Eckhart), un chemin qui pointe vers la désidentification et le dépouillement, un appel à l'humilité, un rappel de notre nature véritable en deçà du masque de la "persona" (la personne vient étymologiquement du latin persona qui signifie masque). L'invitation à se connaître soi-même, à connaître le Soi véritable y est omniprésente. L'enseignement spirituel traditionnel opère de façon directe à partir de la question "qui suis-je" ou "que suis-je" pour explorer nos identifications abusives au corps et à l'esprit nés de l'ignorance. Il s'agit donc bien de révéler une connaissance mais nullement dans le sens ordinaire de ce mot.
Dans le sens usuel, connaissance signifie l'opération par laquelle l'esprit humain procède à l'analyse d'un objet, d'une perception, ou d'une forme de réalité et accumule des savoirs à leur propos en vue de pouvoir les étiqueter, les comparer, les juger, les comprendre, les situer dans l'espace en relation avec d'autres concepts, pour pouvoir tirer des conclusions à leur sujet. Lorsque l'on cherche à connaître quelque chose de cette manière, notre attention est orientée vers un but. L'esprit est en mode de recherche et il est alors entièrement contracté autour de cette quête d'informations et de savoirs en vue de comparer les idées, produire des concepts et ainsi pouvoir se rassurer faussement avec des pseudo certitudes. Il n'y a aucun problème à ce mécanisme qui est aussi naturel à l'esprit que pour le foie de produire de la bile, ou aux reins de filtrer le sang.
Le problème apparaît dés que notre attention s'est fixée sur un savoir, un concept ou une connaissance. Car elle semble s'y figer presque de façon définitive. Nos pseudo savoirs finissent par générer une sorte de tissage complexe de conditionnements. Celui-ci opère comme une trame égotique d'attraction-répulsion qui s'interpose de façon plus en plus dense entre nous et le monde. Ce filtre œuvre de façon transparente un peu comme si nous entrions en relation avec les perceptions et les expériences avec des lunettes de soleil qui coloreraient le monde sans que nous ayons conscience de les porter. Nous percevons et agissons sans cesse au travers de ce filtre mais nous ne le réalisons pas. Ainsi, le champs de notre attention est très rarement totalement ouvert, car il est sans cesse filtrée par nos préférences personnelles qui orientent notre regard et nos actions de façon complètement conditionnée. L'attention pure et impersonnelle s'est transmuée en intention personnelle sans que nous nous en soyons rendu compte. Le filtre de nos savoirs et de nos préférences s'est densifié au point de nous couper de la réalité. Nous vivons au niveau des étiquettes et des jugements. Nous sommes parvenus au point où mettre nos ressentis en mots est devenu plus important que le fait même de ressentir. Au lieu de ressentir la vie nous la pensons. C'est un peu comme partir en vacances avec l'attention sans cesse portée sur l'idée d'en parler aux autres au retour et de leur montrer les photos. Vivre ainsi, de façon mécanique et grossière, génère une grande insatisfaction et de la lassitude. Au final cela conduit un grand nombre d'humains à la dépression ou à la maladie psychique. Nous sentons confusément que nous avons perdu la connexion avec l'innocence de l'enfance et la joie simple de se sentir vivant. Inconscients de tout ce fonctionnement, nous pensons que de nouveaux savoirs ou de nouvelles expériences pourront rassasier notre sentiment d'isolement et d'incomplétude. Ainsi, nous repartons de plus belle en recherche de connaissances extérieures pour acquérir de nouveaux objets matériels, intellectuels, physiques, spirituels. Aucun être dans notre entourage familial, éducatif, institutionnel, médiatique ou amical ne nous a jamais véritablement suggéré d'arrêter le mouvement même de cette quête infernale vers un toujours plus ou un mieux là-bas dans le futur ou l'ailleurs. Personne ne nous a jamais suggéré de retourner la flèche de l'attention à 180 degrés vers la Présence silencieuse et consciente en amont des pensées et des perceptions.
La véritable connaissance n'a pas d'histoire, n'est pas liée à une idéologie, une religion ou une pratique particulière. Elle ne dépend pas d'un maître aussi éveillé soit-il en apparence. La véritable connaissance n'est pas érudition. Ce qui se rapproche le plus de cette connaissance est un non savoir et des non-états comme le ressenti de la sensation pure, l'étonnement ou l'émerveillement où toute idée d'appropriation ou de moi sont absentes. Toute quête d'informations en vue de savoir de façon objective et définitive nous projette dans un avenir imaginaire, élude le présent et nous éloigne du ressenti. Le ressenti doit se référer à la Présence silencieuse. C'est dans l'absence d'intention et de direction particulière que ce ressenti peut éclore en conscience. L'invitation est simple : constater dans le quotidien de nos vies à quel point nous refusons sans cesse le ressenti au profit de l'activité séparatrice du mental qui veut sans cesse étiqueter, juger et s'approprier une connaissance objective. Constater cela, sans commentaire. Constater. Constater encore. Constater toujours.
Dans le sens usuel, connaissance signifie l'opération par laquelle l'esprit humain procède à l'analyse d'un objet, d'une perception, ou d'une forme de réalité et accumule des savoirs à leur propos en vue de pouvoir les étiqueter, les comparer, les juger, les comprendre, les situer dans l'espace en relation avec d'autres concepts, pour pouvoir tirer des conclusions à leur sujet. Lorsque l'on cherche à connaître quelque chose de cette manière, notre attention est orientée vers un but. L'esprit est en mode de recherche et il est alors entièrement contracté autour de cette quête d'informations et de savoirs en vue de comparer les idées, produire des concepts et ainsi pouvoir se rassurer faussement avec des pseudo certitudes. Il n'y a aucun problème à ce mécanisme qui est aussi naturel à l'esprit que pour le foie de produire de la bile, ou aux reins de filtrer le sang.
Le problème apparaît dés que notre attention s'est fixée sur un savoir, un concept ou une connaissance. Car elle semble s'y figer presque de façon définitive. Nos pseudo savoirs finissent par générer une sorte de tissage complexe de conditionnements. Celui-ci opère comme une trame égotique d'attraction-répulsion qui s'interpose de façon plus en plus dense entre nous et le monde. Ce filtre œuvre de façon transparente un peu comme si nous entrions en relation avec les perceptions et les expériences avec des lunettes de soleil qui coloreraient le monde sans que nous ayons conscience de les porter. Nous percevons et agissons sans cesse au travers de ce filtre mais nous ne le réalisons pas. Ainsi, le champs de notre attention est très rarement totalement ouvert, car il est sans cesse filtrée par nos préférences personnelles qui orientent notre regard et nos actions de façon complètement conditionnée. L'attention pure et impersonnelle s'est transmuée en intention personnelle sans que nous nous en soyons rendu compte. Le filtre de nos savoirs et de nos préférences s'est densifié au point de nous couper de la réalité. Nous vivons au niveau des étiquettes et des jugements. Nous sommes parvenus au point où mettre nos ressentis en mots est devenu plus important que le fait même de ressentir. Au lieu de ressentir la vie nous la pensons. C'est un peu comme partir en vacances avec l'attention sans cesse portée sur l'idée d'en parler aux autres au retour et de leur montrer les photos. Vivre ainsi, de façon mécanique et grossière, génère une grande insatisfaction et de la lassitude. Au final cela conduit un grand nombre d'humains à la dépression ou à la maladie psychique. Nous sentons confusément que nous avons perdu la connexion avec l'innocence de l'enfance et la joie simple de se sentir vivant. Inconscients de tout ce fonctionnement, nous pensons que de nouveaux savoirs ou de nouvelles expériences pourront rassasier notre sentiment d'isolement et d'incomplétude. Ainsi, nous repartons de plus belle en recherche de connaissances extérieures pour acquérir de nouveaux objets matériels, intellectuels, physiques, spirituels. Aucun être dans notre entourage familial, éducatif, institutionnel, médiatique ou amical ne nous a jamais véritablement suggéré d'arrêter le mouvement même de cette quête infernale vers un toujours plus ou un mieux là-bas dans le futur ou l'ailleurs. Personne ne nous a jamais suggéré de retourner la flèche de l'attention à 180 degrés vers la Présence silencieuse et consciente en amont des pensées et des perceptions.
La véritable connaissance n'a pas d'histoire, n'est pas liée à une idéologie, une religion ou une pratique particulière. Elle ne dépend pas d'un maître aussi éveillé soit-il en apparence. La véritable connaissance n'est pas érudition. Ce qui se rapproche le plus de cette connaissance est un non savoir et des non-états comme le ressenti de la sensation pure, l'étonnement ou l'émerveillement où toute idée d'appropriation ou de moi sont absentes. Toute quête d'informations en vue de savoir de façon objective et définitive nous projette dans un avenir imaginaire, élude le présent et nous éloigne du ressenti. Le ressenti doit se référer à la Présence silencieuse. C'est dans l'absence d'intention et de direction particulière que ce ressenti peut éclore en conscience. L'invitation est simple : constater dans le quotidien de nos vies à quel point nous refusons sans cesse le ressenti au profit de l'activité séparatrice du mental qui veut sans cesse étiqueter, juger et s'approprier une connaissance objective. Constater cela, sans commentaire. Constater. Constater encore. Constater toujours.
L'éloignement de notre nature véritable a commencé très tôt. Dés que mon identité m'a été donnée par les autres au travers de mon prénom et d'autres croyances à mon sujet et qu'il y a eu de l'énergie de croyance qui s'est cristallisée autour. Vers l'âge deux 2-3 ans ans environ j'ai commencé à adhérer à ce que les autres disaient que j'étais, c'est à dire une chose ("je suis ceci") pour faire partie du clan humain. Cette étape incontournable dans notre développement a eu pour corollaire une sorte d'apprentissage en continu qui s'apparente plutôt à un endoctrinement. On n'a cessé depuis lors de me gaver d'une masse incroyable de savoirs comme si c'était la vérité absolue. Les adultes responsables et sérieux nous ont souvent prodigués une éducation très mécanique nous coupant de notre état naturel et notre spontanéité d'enfant. On voit combien l'enseignement scolaire traditionnel cherche à détourner l'enfant de son goût naturel pour la rêverie, l'imaginaire, la créativité, le ressenti corporel ou le simple émerveillement en essayant de garder son mental constamment occupé par l'acquisition de savoirs très souvent appris par cœur et non par le cœur. En général les adultes n'apprécient pas l'oisiveté de l'enfant, comme s'il y avait le pressentiment que ces instants où l'attention de l'enfant n'est plus focalisée sur rien de particulier pouvait ouvrir en lui un espace de conscience depuis lequel il pourrait remettre en cause cette identité que la société souhaite lui coller à tout prix.
Ainsi, au cours de notre "éducation", nous nous coupons de plus en plus avec notre état naturel pour devenir des sortes de robots humains dont l'objectif principal est de se procurer de plus en plus de choses matérielles sous forme d'objets, d'expériences, de situations ou de choses immatérielles d'ordre mental, sous forme de savoirs, de croyances ou d'aptitudes dans tel ou tel domaine.
La connaissance vers laquelle pointe l'essence de la spiritualité authentique n'a rien à avoir avec ce mouvement obsessionnel d'acquisition de savoirs intellectuels qui ne fait qu'aimanter et greffer des croyances sur des couches de croyances de plus en plus transparentes, donnant à ces formes monstrueuses l'illusion d'une sorte de continuité et donc d'une impression de vie autonome à laquelle on s'identifie aisément. La connaissance au sens traditionnel du terme est plutôt une co naissance, en deux mots, qui consisterait à naître dans l'instant avec ce qui se présente à nous. C'est une co naissance directe et intuitive. Il s'agit donc de laisser de côté tous nos savoirs accumulées de seconde main et de faire fi de tous nos conditionnements pour aborder la vie le cœur ouvert à l'instant. Nous sommes conviés à faire un STOP total et de revenir ici et maintenant pour commencer l'exploration sans centre de références. En arrêtant ce mouvement incessant de préhension vers plus de connaissances, ce mouvement habituel se révèle soudain comme une simple mécanique. Il s'agit donc tout d'abord de revenir au ressenti et d'explorer par la porte des sens comment le monde des couleurs, des formes, des saveurs, des odeurs, des sensations, des pensées et des émotions s'offrent à nous dans l'instant. Mais notre habitude à étiqueter, juger, comparer, justifier, condamner est puissante et très vite au cours de cette invitation à arrêter le mouvement vers, le mouvement reprend, à l'insu de notre plein gré. Ainsi, même nos expériences d'expansion de conscience, nos instants les plus magiques où nous sommes en contact avec l'essentiel sans masques sont très vite dénaturés par cette mécanique incessante d'étiquetage et récupérés par l'interprétation égotique pour étoffer notre collection d'images. Dés que nous semblons nous approcher de notre être véritable, le piège des concepts et des définitions, des savoirs et des étiquetages nous en éloignent immédiatement. Dés que nous entrons en contact avec un arbre, une fleur, une musique, une peur, une peau, une tristesse, un parfum, un nuage, le piège des mots nous en séparent à nouveau. Nous réalisons que nous ne faisons qu'expérimenter nos conditionnements. Nous découvrons alors que si notre relation avec la vie est devenue si terne, si dénuée d'intensité ce n'est pas à cause de la vie elle-même mais des croyances qui encombrent notre regard, notre écoute et notre ressenti.
La co naissance est une connaissance qui procède non pas par la pensée discursive, et qui ne cherche pas non plus à justifier les savoirs précédemment acquis, mais qui fait table rase de tout savoir de seconde main pour faire une exploration directe et sincère dans l'instant. Cette co naissance ne s'appuie sur aucun concept car elle est cela même qui donne vie aux concepts. C'est une naissance dans l'instant qui précède toute mémoire ou pensée. Pour réaliser cette co naissance, il faut accepter de se rendre totalement vulnérable, accepter de ne rien savoir, accepter de remettre en question toutes nos croyances même celles qui paraissent être des certitudes inébranlables. Il s'agit d'éveiller comme le disait Krishnamurti "la flamme de l'attention" pour éclairer en conscience, sans but, nos zones d'ombre ou d'inconscience, de tension ou de prétention égotique. La véritable connaissance est amour, c'est vibrer avec, c'est être.
Cette exploration directe vise en premier lieu ce à quoi on s'identifie le plus aisément et qui semble être la racine même de notre sentiment de séparation et de souffrance. L'exploration concerne en premier lieu notre croyance (qui est une quasi certitude pour la plupart des humains) d'être un moi séparé, auteur de ses pensées, doté du pouvoir autonome de prendre des décisions et de faire librement des choix ainsi que la croyance d'être un corps ou de posséder un corps. Voyons donc donc en premier lieu si ce que nous sommes vraiment vraiment est bien ce "sac de peau à forme humaine" dont parlait Douglas Harding ?
Demandons-nous par exemple ce qu'est ce corps auquel on s'identifie si aisément ?
Sans jamais remettre en question le concept de corps nous y faisons sans cesse référence comme "mon" corps, comme si c'était la chose la plus évidente au monde. Et personne ne trouve rien à y redire en général. Par contre lorsqu'on prend le temps de l'explorer de façon directe, ce que l'on appelle communément le corps apparaît comme une simple idée, une image mentale qui a pris forme dans un certain nombre d'impressions sensorielles plus ou moins compactes, qui s'expriment par des sensations de densité, de lourdeur, de tension, de contraction, de rigidité, de légèreté, de fluidité, de courants, d'expansion, de température, chaud, tiède ou froid. Tous nos ressentis corporels ne sont clairement localisées qu'en tant que nous les réinterprétons à l'aune de notre mémoire visuelle et sensorielle du corps. Comme c'est ainsi que l'être humain normal fonctionne habituellement, nos impressions corporelles sont généralement très clairement localisées. La densité des ressentis et l'impression de localisation affermissent la croyance d'un corps séparé de l'environnement, fonctionnant de façon autonome, et cristallisent l'idée d'être un individu séparé. Et plus on se polarise sur ces impressions corporelles, plus on construit de scénarios et d'interprétations à leur propos, plus l'impression d'être un moi séparé possédant ce corps s'accroît. L'esprit s'attache facilement aux savoirs définitifs, aux définitions rassurantes et aux conclusions irrévocables. De même l'esprit adore les sensations localisées, simples et limitées auxquelles il est aisé de s'identifier. Le monde du ressenti est un monde où les mots et les étiquettes n'ont guère leur place contrairement au monde visuel. Ainsi dans le domaine sensoriel, l'esprit préfère toujours simplifier à l'extrême en vue de classer sans suite. De plus, un ressenti clair et rigoureux est réconfortant car il légitime la croyance d'être une identité séparé aux commandes de ce corps.
Par contre, si l'on ferme les yeux et qu'on laisse de côté nos savoirs de seconde main, pouvons-nous trouver ce que l'on appelle communément un corps là où on est en ce moment ? Si l'on explore de façon directe et sans la mémoire une sensation, on découvre qu'on ne peut lui donner une forme définitive et que cette forme se transforme d'instant en instant. Lorsque nous entrons dans une écoute impersonnelle des sensations corporelles, elles apparaissent comme autant de poissons dans l'océan que nous sommes. Lorsqu'on écoute avec une attention extrême une sensation, sans peur et sans désir, on découvre qu'elle finit par s'étendre puis se dissoudre dans l'écoute silencieuse comme des volutes de fumée se fondant dans l'espace quelle révèle soudain avec une très grande clarté. Lorsque les sensations corporelles sont laissés libres de toute intentionnalité, elles ne ressemblent plus du tout à ce que l'on étiquetait l'instant d'avant. L'imaginaire se lézarde et les impressions se fissurent. Les impressions corporelles deviennent alors insaisissables pour les mots et impossibles à identifier comme quelque chose de connu. On découvre que c'était nos croyances qui figeaient artificiellement nos impressions corporelles et nos sensations de densité. Plus les impressions corporelles sont écoutées sans filtres, plus les croyances à leur propos s'effondrent et plus les sensations échappent à la préhension et à la compréhension intellectuelle. Alors, on découvre avec stupéfaction que ce qu'on appelait le corps, ce sac de peau à forme humaine, est en réalité une symphonie mouvante de vibrations d'une richesse infinie, que le mental est totalement incapable de saisir, tellement les courants et les mélodies, les rythmes et les harmonies qui résonnent en nous apparaissent soudainement d'une complexité invraisemblable et d'une beauté époustouflante. Cette écoute impersonnelle des sensations corporelles ouvre un monde fabuleux de ressenti silence qui ébranle puissamment l'édifice personnel, car il est vu qu'il est impossible d'emprisonner la réalité du corps mouvant, émouvant et en perpétuel mouvement dans un concept ayant un début et une fin, un intérieur et un extérieur et séparé de l'environnement. Le corps pensé devient un corps de silence et d'espace et de conscience. Le corps humain qui semble localisé et limité dans l'imaginaire, lorsqu'il est écouté par la Présence silencieuse apparaît désormais comme un corps sans forme ni bornes contenant l'univers. Cette connaissance n'est pas linéaire. Elle est co naissance car nous naissons avec ce corps nouveau dans une unité indicible.
Nous nous identifions également à un esprit. Poursuivons notre exploration directe, en laissant de côté nos savoirs de seconde main et notre mémoire pour voir si l'on peut faire co-naissance avec quelque chose appelé un esprit ? Au premier abord ce que l'on appelle esprit semble être une cacaphonie complètement frénétique de pensées, d'images, de sons et de mémoires. Puis, lorsque l'on écoute de façon impersonnelle le mouvement des pensées, on s'aperçoit qu'au bout d'un moment le rythme d'apparition se calme peu à peu et la trame des pensées au début très opaque se desserre de plus en plus.
Les pensées ne viennent elle pas du vide pour retourner vers le vide ? Que sentez vous, que voyez vous ? Choisissez un arbre dont le nom commence par un C. D'où vous est venu cette pensée ? D'un esprit ou plutôt d'un vide inconnaissable et conscient ? Les pensées changent constamment. Mais est-ce que vous, vous qui êtes présent et conscient ici et maintenant des pensées qui naissent et meurent, est-ce que vous, vous changez ? Pensez-vous les pensées ou vous apparaissent elles pour ensuite disparaître ? Observez cela avec une attention extrême. Cette question est essentielle. Y a-t-il un penseur pensant les pensées ou vous apparaissent-elles d'instant en instant au sein d'un espace conscient ?
Ne restez-vous pas immuable, présence consciente, espace d'accueil pour toutes ces pensées qui vous traversent sans vous affecter ? Quelle est votre histoire dans l'instant présent ? Avez vous un nom, une famille, une adresse, une nationalité, une profession, un monde, un âge, un passé, un avenir, un caractère dans l'instant présent ? N'êtes vous pas libre, totalement libre de toutes ces caractéristiques. N'êtes vous pas le sans forme qui accueille toutes ces formes ? Vous manque-t-il quelque chose dans l'instant présent ? N'êtes vous pas la plénitude de l'Être sans définition qui accueille en son sein toutes les définitions ?
Lorsque nous examinons les pensées avec une attention sans préférence on observe un changement de perspective. Elles perdent peu à peu le pouvoir de nous limiter car au lieu d'apparaître en elles ce sont elles qui apparaissent en nous. Ce changement de perspective est un changement de paradigme. On passe d'une expérience duelle à une perspective non duelle par le biais du ressenti silence. Une sorte de décollement a lieu et nous nous expérimentons comme le témoin impersonnel et permanent des pensées personnelles et impermanentes. Brusquement la connaissance authentique s'éveille telle une évidence : Je ne suis pas mes pensées, je suis depuis toujours l'espace silencieux et conscient en lequel elles apparaissent et disparaissent.
Une spiritualité authentique ne cherche pas à expliquer la souffrance présente en la reliant à des expériences vécues dans le passé. Elle vous invite au ressenti et met l'accent sur le fait que c'est votre refus de ressentir qui a créé la souffrance. Elle ne cherche pas à vous changer ou à vous libérer. Elle propose d'écouter ce qui est là et à vivre avec ce qui est. Pourquoi refuser la douleur, vouloir échapper à la souffrance ? Ce sont toujours des cadeaux que la vie nous offre pour nous interroger. Et à travers nous, c'est la vie qui cherche s'interroger elle-même, la partie d'elle-même qui demeure encore voilée.
En tant que personne accompagnée puis en tant que thérapeute psycho corporel depuis une vingtaine d'années, j'ai pu observer l'importance cruciale de l'écoute des émotions pour inviter à la découverte de que nous ne sommes pas et réaliser qui nous sommes vraiment vraiment. Car, s'il peut être aisé pour certains esprits ayant certaines aptitudes de comprendre intellectuellement la connaissance non duelle dont on parle ici, la rencontre avec les émotions permet de voir et de ressentir si cette compréhension est simplement mentale ou si elle est vraiment descendue dans le cœur et dans le ventre, notre second cerveau, notre cerveau émotionnel. Une des explorations directes les plus radicales qu'un être puisse faire est bien souvent celle qui passe par le niveau émotionnel. C'est pourtant une voie souvent minorée voire méprisée par certains communicants de non dualité. L'écoute impersonnelle des émotions est sans aucun doute le ferment le plus puissant pour la dissolution de l'impression d'être un moi séparé. Je l'ai constaté maintes et maintes fois en séance individuelle ou en stage et j'ai reconnu cette même puissance contagieuse d'éveil auprès des communicants de non dualité qui accompagnent les émotions avec grand art tels que Gérard, Somasekha, Frédéric Moreau, Byron Katie, Rupert Spira, eric Baret et beaucoup d'autres qui ont cette sensibilité et cette capacité. Car une chose est d'inviter par le langage à ressentir de façon impersonnelle les émotions et une autre est d'inviter à ce ressenti en direct lorsque cela s'impose.
Notre connaissance des émotions est habituellement confinée dans des concepts. Nous pensons nos émotions plutôt que de les vivre. Autant dire que notre prétendue connaissance à leur propos est purement imaginaire et nous empêche d'entrer en contact avec elles. Car cette connaissance est en réalité une mise à distance orchestrée par l'énergie de croyance en un moi séparé. C'est une fausse connaissance qui opère comme une résistance à ressentir. Et c'est la peur de n'être rien qui frémit sous ces fausses couches de connaissance.
Pour explorer une émotion il s'agit évidemment d'être dans une ouverture totale à ce qui se présente, sans jugement et sans objectif pour permettre une observation qui soit la plus neutre possible. Pour cela il s'agit de ne pas mettre l'accent sur l'histoire liée à l'émotion. Il ne s'agit pas de comprendre sa cause ou d'analyser le pourquoi de son apparition. Relier simplement l'émotion à une origine localisable dans l'espace temps comme le font la plupart des rares thérapeutes qui accompagnent les émotions est une vision tronquée et idéalisée de la réalité qui ne fait qu'amoindrir et déplacer momentanément la souffrance. Pour écouter une émotion de façon impersonnelle et dans une ouverture totale, il s'agit de mettre l'attention sur la fréquence vibratoire de l'émotion, au niveau purement sensoriel et tactile. Car pour connaître une émotion, nous devons la co naître et donc naître avec elle et en elle. Ainsi le sujet (l'observateur) et l'objet (l'émotion en tant que perception) fusionnent amoureusement pour disparaître et révéler l'espace conscient que nous sommes vraiment vraiment. Peu à peu nous découvrons que cette écoute permet de passer du manque à la plénitude et nous prenons de plus en plus plaisir à laisser nos émotions libres de jugement et d'interprétation. Peu à peu l'attention ne se porte plus sur l'histoire construite autour de l'émotion mais sur la sensation purement tactile. Ainsi on découvre un nouvel univers fascinant, de feux d'artifices se déployant dans la nuit obscure pour rejoindre la beauté de la nuit et révéler de façon de plus en plus évidente l'inconnu conscient que nous sommes. Lorsque nous arrêtons de résister aux émotions et que nous les laissons libres de se mouvoir à leur guise elles nous traversent sans nous affecter et nous révèlent en tant que Présence silencieuse.
Profondément, l'invitation est de voir qu'il y a une espèce de cercle vicieux entre l'image qu'on a créé de son corps et la souffrance personnelle. Quand on souffre on a l'impression d'être quelqu'un, d'être quelque chose et on renforce l'idée d'être un moi séparé. Il y a l'idée d'être quelqu'un de bien. C'est moral de souffrir, ça correspond à une image à laquelle moi-même et mon entourage peuvent adhérer. Et en même temps, l'histoire que l'on se raconte à propos de comment la vie devrait être ou ne pas être maintient en place les tensions et les densités corporelles. Elle permet paradoxalement à un niveau très grossier de se sentir vivant. Elle conforte l'identification de notre être à la croyance d'être une personne ce qui est validé par la société. Sans cette histoire que serions nous ? Quand l'histoire que l'on se raconte commence à se délayer, les sensations corporelles grossières se morcellent, se fluidifient puis se dissolvent. On finit par ne plus ressentir le corps tel qu'on le connaissait. Le corps vivant dans l'instant ne ressemble plus au corps imaginaire figé dans la mémoire, dont les sensations sont solides. Cela est très déconcertant. Le corps semble devenir courants puis espace. Le moi se fond avec la liquéfaction des tensions corporelles. On peut alors avoir le pressentiment de ne rien être. Lorsqu'on pense ce rien surgit le néant et une terreur indicible (voir "La Nausée" de Sartre) mais lorsqu'on le vit directement c'est la plénitude ultime.
Ainsi cette exploration minutieuse, patiente, assidue et directe de ce que nous ne sommes pas nous fait passer par toute une série de désidentifications qui nous font passer du sentiment de manque à la plénitude d'être. Peu à peu les pensées crues finissent par n'être plus que de simples pensées, l'énergie de croyance qui maintenait l'attention fixée dessus s'est évaporée. Ce que nous pensions être se dissout comme une illusion d'optique et au cœur du dessin au premier plan sur lequel notre attention ordinaire était habituellement rivée apparaît, lorsque notre attention se défocalise, un autre dessin en 3 D. Nous changeons de dimension. Nous nous rendons compte que nous ne sommes pas un moi séparé dans un corps limité mais un espace de présence consciente, impersonnelle, sans nom, sans forme, sans limites, sans poids et sans âge, une mystérieuse et joyeuse sensation d'être conscience consciente d'être. Un pur "je suis" ne revendiquant aucune forme mais les embrassant toutes. Un espace infini qui dit toujours oui à tout ce qui en son sein apparaît et disparaît.
La connaissance véritable est donc co naissance et consiste à naître avec ce qui est dans l'instant. Et ce qui est dans l'instant et qui demeure d'instant en instant est ce Sans Forme prenant toutes les formes que nous n'avons jamais cessé d'être, mais que nous ne voyions pas parce que nous le cherchions dans une forme particulière. Paradoxe ultime, ce que nous sommes vraiment vraiment, le sans forme et le sans nom se cache en réalité dans toutes les formes et se conjugue simultanément dans toutes nos pensées et nos expériences. De "Je suis" on réalise "Je suis Cela".
Ainsi la spiritualité authentique ne nous propose pas d'ajouter de nouvelles croyances à nos couches anciennes. La véritable connaissance n'est pas une création mais une décréation sans personne qui décrée. Elle ne nous propose par l'acquisition d'un quelconque savoir objectif auquel on pourrait se référer ou sur lequel on pourrait s'appuyer pour amoindrir notre angoisse du vide ou accroître notre sentiment de puissance individuelle. La spiritualité traditionnelle est un retour au simple, un retour à l'Ici que nous n'avons jamais quitté autrement qu'en imaginaire. L'invitation est de revenir au Soi, qui est notre place non localisable et pourtant bien présente ici et maintenant. Il s'agit de revenir à la fraîcheur de l'instant et regarder le monde depuis le regard désencombré de tous nos vains savoirs. Rester là, sans rien faire, sans penser, pour simplement être et ressentir. Pour le pratiquant spirituel conventionnel, cette invitation résonne de façon souvent inquiétante. Être Ange ?
Car on lui demande de faire table rase de tous ses précieux savoirs et de revenir à l'humilité essentielle dont parle merveilleusement Maître Eckhart dans le sermon du pauvre d'esprit : "je ne possèdes rien, je ne veux rien, je ne sais rien". C'est un coup d'arrêt brutal à toute quête de connaissance tournée vers les objets ou les pensées. L'invitation est un abandon, une soumission totale à ce qui est puis de laisser la vie se déployer en nous, sans filtres et sans résistances. La véritable connaissance est co naissance, car elle ne peut être connue mais seulement vécue. Tout sentiment de séparation s'est effondré. Il n'y a même plus d'individu séparé pour prétendre avoir compris quelque chose. Car au bout de cette exploration se révèle l'inconcevable :
Je suis la connaissance qui inclut et unit tous les contraires et les transcende à la fois. Lorsque notre nature absolue se révèle, elle se révèle en naissant à elle-même en tant que co naissance. L'Un qui après s'être oublié dans le multiple se reconnaît en tant que Un et unique et se reconnait en toute perception. Et ce n'est même pas après car cela se passe hors du temps linéaire, et en quelque sorte simultanément. Je vous le disais, c'est inconcevable. La connaissance n'est plus la connaissance d'une entité particulière mais la reconnaissance d'être la connaissance absolue. C'est une connaissance qui s'éprouve sans personne pour l'éprouver.
NB : Pour ceux qui sont intéressés par un accompagnement individuel non-duel à Paris ou par Skype, une thérapie d'accompagnement psycho-corporelle pour laisser éclore les émotions bloquées, ou une séance de réharmonisation vibratoire, veuillez me contacter au 06 63 76 90 81 ou sur mon mail : adnnn1967@gmail.com
Si vous voulez vous inscrire pour les rencontres non duelles (sur la base d'une participation en conscience) qui ont lieu de façon bi-mensuelle à chez moi dans le 19e à Paris, écrivez-moi un sms sur le numéro ci-dessus.
Merci...........pour ce beau texte inspirant ♥
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