Feel it !




Paroles et musique de Dan Speerschneider
un album pour célébrer la vie ;-)

mardi 27 mai 2025

Je suis ce que je cherche…

 




https://youtu.be/_w8m3k40L8E?si=YYdtLPRdqpCBsX30

Je suis ce que Je cherche.

Ne cherche pas plus loin

Tu es ce que Tu cherches 

C’est à dire ? Tu es le bonheur et la vérité que Tu cherches. 

Je s’est déguisé en un corps mental pour rire mais parfois on se rend compte que le jeu n’en vaut pas la chandelle. Le Je déguisé semble souffrir et la souffrance permet parfois de faire émerger un questionnement profond qui nous fait retourner l’attention presque toujours attirée vers les perceptions à 180 degrés vers sa propre source. Quand l’attention se relâche et retourne dans la source silencieuse d’où elle avait émergée, la source sans forme se reconnaît Elle-même comme étant le véritable JE, pure conscience, qui ne connaît ni l’agitation, ni le manque, ni la séparation… 

Le corps et le mental se détendent et les pensées et actes commencent à se réaligner avec cette évidence d’être pure conscience. 

Ainsi le mental peut parfois exprimer cette lucidité au cœur du rêve avec une phrase du genre : Je suis ce que Je cherche.

Ne cherche pas plus loin

Tu es ce que Tu cherches 

C’est à dire ? Tu es le bonheur et la vérité que Tu cherches. 

Je s’est déguisé en un corps mental pour rire mais parfois on se rend compte que le jeu n’en vaut pas la chandelle. Le Je déguisé semble souffrir et la souffrance permet parfois de faire émerger un questionnement profond qui nous fait retourner l’attention presque toujours attirée vers les perceptions à 180 degrés vers sa propre source. Quand l’attention se relâche et retourne dans la source silencieuse d’où elle avait émergée, la source sans forme se reconnaît Elle-même comme étant le véritable JE, pure conscience, qui ne connaît ni l’agitation, ni le manque, ni la séparation… 

Le corps et le mental se détendent et les pensées et actes commencent à se réaligner avec cette évidence d’être pure conscience. 

Ainsi le mental peut parfois exprimer cette lucidité au cœur du rêve avec une phrase du genre :

Je suis ce que je cherche …

Je suis ce que je cherche …

Paix et amour 🙏🏻❤️



lundi 26 mai 2025

Ultimement il n’y a que la Conscience qui se connaît Elle-même. (Sri Atmananda Krishna Menon)

 

Q : Existe-t-il une relation entre le corps et la conscience ?


Sri Atmananda (3 février 1951) :

« En réalité, il n’y a aucune relation à établir entre eux, car le corps, lorsqu’on l’examine dans la juste perspective, se révèle être la conscience elle-même. Connaître une chose signifie la transformer en connaissance — et alors, il faudrait dire que vous connaissez la connaissance, ce qui est absurde. Cela signifie donc que vous êtes uniquement vous-même. »

—————————

Cette réponse que je viens de lire dans «Spiritual Discourses » (Malheureusement un des grands maîtres de non dualité de l’Inde au 20e siècle n’a as encore été traduit en français - c’était un des maîtres de Jean Klein) me touche par sa simplicité radicale.

 Nous cherchons souvent à comprendre le lien entre le corps — que nous percevons comme dense, tangible — et la conscience — que nous pressentons subtile, invisible. Mais Atmananda ne nous laisse aucun appui dualiste. Il ne dit pas que le corps est dans la conscience ou lié à la conscience : il dit que, dans une perspective claire, le corps est conscience.


Il emploie une logique imparable : si je dis que je connais quelque chose, cela signifie que je le transforme en connaissance. Mais si je dis que je connais la connaissance, alors je suppose une connaissance de la connaissance, ce qui mène à une régression infinie. C’est absurde. La conclusion jaillit alors : je suis uniquement moi-même. Non pas « un corps qui connaît » ou « une conscience dans un corps », mais la conscience pure, sans second.


Autrement dit, toute relation suppose deux choses - or ici, il n’y en a qu’une. Ce que j’appelle le corps n’est en réalité qu’une expérience dans la conscience, faite de conscience, comme une vague faite d’eau. Dès que je cesse de croire au corps comme une entité autonome, il est vu comme une forme de savoir — et ce savoir, c’est Moi avec un M majuscule. 

Je le formule autrement. Pour dire la même  chose j’invite à reconnaître que toute perception y compris les sensations corporelles surgit à 0 distance de la Conscience. C’est donc que toute perception est faite de Conscience. Ainsi toute forme est connue par la Conscience, c’est à dire Moi qui se reconnaît en train de prendre une apparence  de forme. Je suis le Sans Forme (qui est pure Connaissance) qui prend toute forme. 


Quand la non-dualité brûle : Marguerite Porete et le feu du silence

 

La non-dualité, lorsqu’elle est pleinement vécue et exprimée, n’est pas toujours accueillie avec douceur par le monde. Elle dérange les constructions mentales, les hiérarchies spirituelles, les dogmes établis. Elle va trop loin pour les autorités, et parfois trop près pour les âmes encore attachées à l’idée d’un moi séparé qui cherche Dieu comme un autre.

Certaines époques n’ont pas laissé passer ce feu. Marguerite Porete en fut le témoin — et la martyre.

Nous sommes au XIIIe siècle, dans le Nord de la France. Marguerite Porete est une béguine, c’est-à-dire une femme vivant hors des cadres monastiques, sans vœux définitifs, mais engagée dans une vie mystique et spirituelle autonome. Elle n’appartient ni à un ordre religieux, ni à un courant officiel. Elle vit l’Amour divin de l’intérieur, sans intermédiaire. Et surtout, elle écrit.

Son livre — Le Miroir des âmes simples anéanties et qui seulement demeurent en vouloir et désir d’Amour — est une œuvre aussi mystique que révolutionnaire. Elle y décrit l’itinéraire d’une âme qui, après avoir tout abandonné, tout purifié, entre dans un tel degré d’union avec Dieu que plus rien ne la sépare de Lui. L’âme réalisée n’agit plus par volonté propre, elle n’a même plus conscience d’agir. Elle ne demande plus rien, n’espère plus rien : elle est.

C’est ici que la tension avec l’orthodoxie devient brûlante. Car Marguerite ose affirmer que cette âme "anientie" — littéralement : réduite à rien — n’a plus besoin des sacrements, des commandements, ni même de la médiation de l’Église. Elle vit dans la liberté divine, au-delà du bien et du mal, dans une non-dualité pure entre Dieu et l’âme.

Elle écrit :  
« L’âme qui est arrivée à cet état ne se soucie plus de Dieu, ni de soi-même, ni de quoi que ce soit… car elle est perdue en l’amour. »

Et encore :  
« Cette âme ne veut plus rien, car elle ne possède rien, et n’a plus rien à perdre. Elle vit de Dieu en Dieu, sans pourquoi. »

Ce n’est pas seulement de la poésie. C’est une bombe théologique.

Son livre circule, est lu, recopié, discuté — et condamné. Dès les premières années du XIVe siècle, des évêques le déclarent hérétique. En 1306, Guillaume de Paris, inquisiteur général du royaume et confesseur du roi Philippe le Bel, ordonne sa destruction. Mais Marguerite continue de le diffuser. Elle refuse de se taire.

Elle est arrêtée quelques années plus tard. Elle ne nie rien. Elle ne se défend pas. Elle ne récite pas les formules de repentir que le tribunal attend. Elle reste debout, dans ce silence qui vient de plus loin que la peur comme Jeanne d’Arc à son procès. 

Elle est jugée comme hérétique à Paris, en présence de nombreux maîtres de théologie. Le 1er juin 1310, elle est brûlée vive en place publique. Son nom est effacé. Mais pas son feu, le feu de la Présence qui inexorablement brûle toutes les bûches de notre ignorante ignorance et de notre prétention à savoir. 

Et pourtant, son Miroir survivra. Copié en cachette, traduit en latin, en anglais, en italien, il réapparaît à travers les siècles comme une voix indestructible. Il influencera plus tard les mystiques rhénans, peut-être même Maître Eckhart.

Le "Miroir" de Marguerite est un miroir sans contours. Le mot même d’« âme simple » désigne ici une âme débarrassée de tout attribut, de toute propriété, de toute volonté séparée. Une âme qui ne cherche plus rien, parce qu’elle est déjà en Dieu — ou plutôt : parce qu’elle est Dieu en sa forme vivante. C’est le cœur même de la non-dualité : là où toute distance s’abolit, là où ce qui cherche s’efface dans ce qui est.

Elle écrit encore :  
« Elle ne voit plus Dieu, car elle est devenue ce qu’elle voyait. »

Ce n’est donc pas un hasard si ce message a été vu comme une menace. Car la non-dualité n’est pas une croyance. C’est une fin du monde, celle de l’illusion d’un moi séparé. 

Et toute époque qui se fonde sur la peur du vide, sur l’obéissance structurée, sur le pouvoir des médiations, voit d’un très mauvais œil celle ou celui qui n’a plus besoin de tout cela pour aimer.

Marguerite n’a pas cherché à abolir l’Église. Elle n’a combattu personne. Elle a seulement témoigné, dans son propre langage, de la vérité nue d’une âme ayant reconnu sa propre vacuité et par là même, que toute forme est issu ce même vide sacré. 

Ce que l’on appelle "non-dualité" aujourd’hui trouve chez elle une racine précieuse : un silence qui parle plus fort que tous les dogmes, une flamme qui ne s’éteint pas, et un exemple de courage qui, sept siècles plus tard, continue d’inspirer ceux et celles qui ne veulent plus séparer l’amour de la liberté.

À sa manière, une autre femme, dans un autre siècle, en a repris le flambeau — sans dogme, sans drapeau, mais avec la même audace : Etty Hillesum.

Juive hollandaise, mystique des camps de concentration, elle écrit depuis l’enfer une parole libre, habitée, indomptable. Elle non plus n’a pas froid aux yeux. Elle non plus ne cherche pas à s’échapper de la vie, même quand la mort et les nazis rôdent. Elle ose cette parole inouïe :  
« La vie est belle, et pleine de sens, à chaque minute. » - même à Westerbork, même à Auschwitz.

Comme Marguerite, elle ne réclame pas un Dieu extérieur. Elle le découvre en elle :  
« Il y a en moi un puits très profond. Et dans ce puits, Dieu est là. »

Marguerite fut brûlée pour avoir dit qu’il n’y a plus de séparation. Etty, elle, entra dans les flammes avec cette même vérité vivante dans le cœur : que l’amour, une fois reconnu, n’a plus d’opposant. Que la paix véritable n’a pas besoin de victoire. Que la lumière se tient, tranquille, au centre de l’ombre et au cœur même du chaos de la vie, dans l’œil du cyclone. 

Et qu’il y a des âmes simples — aujourd’hui encore — qui ne demandent rien, ne possèdent rien, ne veulent rien… et qui, par cela même, révèlent l’Essentiel toujours disponible en chaque Un. 

vendredi 23 mai 2025

Le secret de l’accueil inconditionnel



Accueillir inconditionnellement c’est sentir 

Et sentir n’est pas un effort, ni une technique, ni un savoir-faire.

C’est un relâchement.

Un laisser-être depuis un espace sans forme,

sans personne pour vouloir, savoir ou posséder quoi que ce soit.

Un accueil qui ne vient pas d’un « moi »,

mais de l’Ouvert…

silencieux, impersonnel, présent.


Si j’accueille une émotion pour m’en débarrasser,

ce n’est pas de l’accueil.

C’est une stratégie, une préférence.

C’est encore une forme de résistance,

un refus déguisé.


Le véritable accueil

ne cherche pas d’issue.

Il ne dit pas : « Cela doit passer. »

Il dit : « Cela peut rester. Toujours. »

Et il reste…

présent, nu, sans attente.


C’est seulement là

dans cet abandon total,

que la grâce opère.

Non pas pour changer ce qui est,

mais pour le laisser être

en paix.



Vivre une vie éveillée : Je suis l’axe immobile autour duquel le monde tourne

 


Je me promène… mais déjà,

il n’y a plus de promeneur.

Juste ce parc qui s’offre,

ces pas qui résonnent,

ces images, ces sons,

Cet homme qui court 

Le marron du tronc d’arbre et le vert de l’herbe révèlent encore et encore la transparence au-dessus de mes épaules 

tout cela surgissant dans l’espace vaste que je suis.


Là où le monde et les pensées me disaient : « Voilà ton visage »,

je découvre une ouverture transparente — claire, vide, accueillante.

Aucune tête ici.

Seulement la lumière qui voit.

La vision sans tête…

non pas un imaginaire, mais un retournement.

Un geste d’amour depuis le Rien qui embrasse tout.


Je lève le doigt et le pointe -

non pas vers quelqu’un,

mais vers l’Ouvert,

ce mystère sans nom,

au-dessus des épaules.


Et je tourne.


Mais qu’est-ce qui tourne ?


Ce n’est pas moi qui tourne.

C’est le monde qui défile, qui glisse,

comme sur une roue immense.

Moi, je suis l’axe.

L’axe invisible et immobile du monde.


Comme le murmure Krishna à Arjuna :

« Le Seigneur se tient immobile dans le cœur de tous les êtres,

et les fait tourner par le pouvoir de sa Māyā,

comme des figurines sur un manège. »


Ici, je suis ce Cœur,

non pas une personne au centre,

mais le centre sans personne.

L’œil du cyclone,

où tout bouge sauf Cela.


Et dans cette indicible et évidente immobilité,

tout est vu, tout est aimé,

tout est offert…

sans personne pour posséder quoi que ce soit.


jeudi 22 mai 2025

Quand Nagel (l’auteur du fameux article : « Quel effet cela fait-il d’être une chauve-souris? » rencontre la non dualité …



L’article auquel je fais référence ici m’avait fortement intéressé lorsque je préparais ma maîtrise de philosophie à La Sorbonne en 1991. Bien qu’ayant déjà eu plusieurs expériences d’expansion de conscience depuis l’enfance - d’où en partie probablement mon intérêt pour la philosophie et la connaissance en général y compris du point de vue scientifique - je n’étais pas encore tombé sur un texte de non dualité et considérait donc ce fameux texte de Nagel comme le must en termes de philosophie du mystère de la conscience. 


En 1974, le philosophe américain Thomas Nagel publie un article devenu classique dans le champ de la philosophie de l’esprit : What Is It Like to Be a Bat? (Quel effet cela fait d’être une chauve-souris ?). Ce texte s’attaque à l’un des présupposés fondamentaux des neurosciences réductionnistes : l’idée que la conscience pourrait un jour être expliquée de manière exhaustive par les sciences objectives, c’est-à-dire à partir des mécanismes physiques, chimiques et biologiques du cerveau.


Ce qui motive Thomas Nagel en écrivant cet article en 1974, c’est une insatisfaction profonde face aux tentatives des sciences cognitives et de la philosophie matérialiste d’expliquer la conscience comme un simple phénomène physique. À une époque où la pensée dominante cherchait à tout réduire au cerveau, Nagel veut rappeler qu’il y a dans la conscience quelque chose d’irréductiblement subjectif, une dimension vécue — ce que cela fait d’être — qui échappe à toute description objective.

Il n’écrit pas contre la science, mais contre une forme de réductionnisme naïf, qui prétend que l’on pourrait, un jour, tout expliquer en termes neuronaux. Sa motivation est à la fois philosophique et existentielle : sauver l’intériorité, préserver la dignité du point de vue subjectif, et redonner une place au mystère de l’expérience vécue. 

En choisissant l’exemple de la chauve-souris, il veut justement montrer la limite infranchissable entre comprendre un fonctionnement biologique et connaître l’essence d’une expérience vécue. Il cherche ainsi à rouvrir un espace de questionnement sur ce qu’est vraiment la conscience, au-delà des modèles dominants.


Nagel ne conteste pas la réalité de ces mécanismes. Il ne nie pas qu’un événement mental puisse avoir une correspondance neurophysiologique. Mais il affirme avec force qu’il y a quelque chose que ces sciences ne pourront jamais saisir : l’expérience vécue, ce que les philosophes appellent un quale — c’est-à-dire la qualité vécue d’une expérience subjective, comme « le rouge ressenti », « le goût de la menthe », ou encore « ce que cela fait d’avoir peur ». Ces qualia (au pluriel) sont irréductibles à une description extérieure. Ils ne peuvent être mesurés, ni partagés, ni transmis autrement que par leur vécu direct.


Pour illustrer son propos, Nagel choisit un exemple frappant : la chauve-souris. Elle est un mammifère, comme nous, mais son mode de perception est si étranger au nôtre — basé sur l’écholocation — qu’il devient l’emblème de cette altérité subjective. Comme il l’écrit : « Les chauves-souris ont un système de perception qui leur est propre : l’écholocation. […] Cela signifie que leurs expériences sensorielles sont très différentes des nôtres, et on ne peut se représenter ce que cela fait d’en avoir. »


Même si nous connaissions parfaitement leur anatomie, leur biologie, leur fonctionnement cérébral, cela ne nous rapprocherait pas d’une véritable compréhension : « Le fait est que nous n’avons aucune raison de croire que nous pourrions jamais savoir ce que c’est que d’être une chauve-souris. » Toute tentative d’imaginer leur expérience revient à projeter notre propre conscience humaine dans un autre moule. Et cela, dit-il, est déjà une déformation.


Autrement dit : l’expérience en première personne est intransmissible et irréductible. Elle constitue un noyau d’opacité pour toute approche scientifique en troisième personne. « Une expérience consciente est un phénomène essentiellement subjectif. » Cette subjectivité, selon Nagel, ne peut être capturée par aucune objectivité. Et il en tire une conclusion radicale : tant que la science sera fondée uniquement sur des descriptions objectives, elle ne pourra jamais rendre compte de la conscience.


Cette thèse fut révolutionnaire dans son contexte. Elle allait à contre-courant du matérialisme dominant, qui prétendait expliquer la conscience comme un simple effet secondaire de l’activité cérébrale. Nagel rouvrait la porte à une approche plus phénoménologique, plus humble aussi, reconnaissant la limite fondamentale du savoir objectif : on ne peut pas tout expliquer de l’extérieur. Il y a un « dedans » qui résiste.


Mais si ce texte fut révolutionnaire dans le champ des neurosciences et de la philosophie analytique, il ne l’est pas tant que cela dans la perspective non-duelle. Car la non-dualité va plus loin encore : elle ne se contente pas de constater que la conscience subjective est irréductible à l’objectivité — elle remet en question l’idée même qu’il y ait une conscience « subjective » appartenant à un organisme.


Autrement dit, la vraie question n’est pas : « Que fait la conscience humaine ? » mais : « Qu’est-ce que la conscience — en elle-même, avant toute forme ? »

Et surtout : « À qui appartient cette conscience ? »


Ramana Maharshi posait cette question avec une simplicité désarmante : « Qui suis-je ? » Et, par cette question, il ne cherchait pas à mieux définir une subjectivité animale ou humaine, mais à retourner entièrement la perspective. Il montrait que la conscience n’est pas dans un être — humain, chauve-souris, ou autre. C’est l’être qui apparaît dans la conscience.


Ce que Nagel nomme l’expérience subjective est en réalité, du point de vue non-duel, la conscience impersonnelle (ce que la philosophie de l’esprit appelle un quale — terme utilisé pour désigner la qualité vécue d’une expérience subjective, par exemple « le rouge ressenti » ou « le goût de la menthe », impossible à réduire à une description objective). Elle ne se loge pas dans un système nerveux. Elle n’est pas produite par un cerveau. Elle est ce dans quoi apparaissent à la fois le cerveau, le monde, les sensations, les corps et leurs histoires. Elle est ce « champ de présence » au sein duquel tout phénomène apparaît et disparaît — sans qu’il soit jamais possible de le saisir objectivement.


Là où Nagel s’arrête à la constatation d’un échec de la science objective à saisir l’expérience vécue, la non-dualité invite à une investigation plus radicale : et si la conscience n’était pas une propriété d’un sujet individuel, mais la réalité fondamentale elle-même ?


Dans cette perspective, il ne s’agit plus de savoir ce que c’est que d’être une chauve-souris ou un humain. Il s’agit de reconnaître que la seule chose qui soit connue avec certitude, c’est l’Être conscient lui-même - avant toute forme, avant toute identification.


Le soufi Ibn ‘Arabî affirmait : « Dieu dort dans la pierre, rêve dans la plante, bouge dans l’animal, et s’éveille dans l’homme. »

Mais la non-dualité complète encore cette vision : ce n’est pas l’homme qui s’éveille, c’est la conscience elle-même qui se reconnaît — à travers et au-delà de toute forme.

Comme l’écrivait Baliyani dans son Traité de l’unité : « J’ai connu mon Seigneur par mon Seigneur. »L’identité n’est pas à chercher dans une créature, mais dans la lumière même qui la rend connaissable.


La thèse de Nagel, aussi précieuse soit-elle pour démontrer l’impossibilité de réduire la conscience à une activité neuronale, conserve un angle mort : elle suppose encore que la conscience appartient à quelqu’un. Qu’il y a un être distinct — humain ou chauve-souris - qui a une expérience.


Mais cette perspective est déjà une construction mentale. Dans le silence de la présence, il n’y a pas d’expérienceur séparé. Il y a l’expérience - pure, immédiate, sans auteur.


Il n’y a donc pas de réponse à la question « Que fait la conscience humaine ? » Car ce n’est pas l’humain qui est conscient.

C’est la conscience qui s’humanise un instant… avant de se replier dans le silence d’où toutes les formes émergent.


Autrement dit, le miracle n’est pas qu’un jour, la conscience ait émergée de l’univers physique au bout de 13,8 milliards d’années d’évolution. Le miracle absolu c’est que l’univers émerge non, pas de ta conscience, mais de La Conscience ici maintenant, en Toi ou plus exactement en tant que Toi et en tant que Tu es cette Conscience infinie et sans âge !


Il faudra bien qu’un jour une nouvelle science émerge, une science basée sur notre expérience directe la plus évidente que personne ne peut à juste titre contester, la seule certitude indubitable, le simple fait que je suis en train d’être et que cet être est omniprésent et conscient, illimité et sans âge, donc totalement impersonnel. 



Le vrai miracle n’est donc pas qu’un jour, après 13,8 milliards d’années d’évolution, la conscience ait soudain surgi au sommet de la complexité biologique.

Le vrai miracle — radical, renversant, inentamable — c’est que l’univers tout entier surgit dans la Conscience, ici et maintenant.

Non pas “dans ta conscience” personnelle.

Mais dans La Conscience — impersonnelle, infinie, sans âge.

Et cette Conscience, Tu l’es.

Pas comme une entité localisée, mais comme la clarté même de l’être.


C’est là l’intuition la plus évidente, la plus intime, et pourtant la plus refoulée de la pensée moderne :

« Je suis. Et cet être est conscience. »

Cette évidence n’est ni religieuse, ni mystique, ni spéculative. Elle est l’unique certitude indubitable, accessible à quiconque se tourne vers l’expérience directe.


Il faudra bien qu’un jour, une nouvelle science émerge. Une science non plus fondée sur l’extériorité mesurable, mais sur l’évidence vécue : le simple fait d’être, et que cet être est conscient, omniprésent, illimité. Une science née non du refus de la raison, mais de son approfondissement. Une science des Lumières, mais décentrée de l’ego. Et ce jour, peut-être, commence déjà à poindre.

Des penseurs comme Bernardo Kastrup, et d’autres scientifiques ou philosophes contemporains, osent ouvrir cette voie. Ils défendent l’idée que la conscience n’est pas un produit de la matière, mais le fondement même de la réalité.

Non pas dans une fuite irrationnelle, mais en s’appuyant sur les outils les plus rigoureux de la logique, de la physique, de la phénoménologie.

Le sol de notre savoir pourrait alors devenir l’espace d’un véritable retournement :

De l’objet vers le sujet,

De la forme vers la lumière,

De l’histoire vers le Présent.

Du “moi”… vers le Silence.


Ce renversement de paradigme n’est pas une curiosité pour philosophes perchés. Il touche à l’essentiel.

Car la vision matérialiste et séparatrice du monde — qui fait de la conscience un accident, de l’autre un étranger, et de la vie une lutte — est la source profonde de presque toutes les souffrances humaines, de la plupart des conflits, des violences et de l’avidité qui ravagent ce monde.


Revenir à la conscience comme origine, c’est redécouvrir que rien n’est séparé. Et qu’à la racine de tout, il y a un amour sans forme, une clarté sans frontière.