Feel it !




Paroles et musique de Dan Speerschneider
un album pour célébrer la vie ;-)

vendredi 28 novembre 2025

Le désir personnel et l’élan impersonnel

 


Il n’y a aucun problème avec le désir lorsqu’il est simplement l’élan vivant vers une expérience, une forme, un paysage, une musique ou une personne. Le malentendu ne naît que lorsque l’on imagine que la réalisation de ce désir va nous apporter plus de paix ou plus de joie que ce que l’on est déjà. À cet instant, on se trompe de direction, car la paix et la joie n’appartiennent pas à l’objet du désir, elles appartiennent à notre être.

Nous sommes déjà ce que nous cherchons. Notre être est déjà parfaitement la paix et la joie qui nous le croyons par une simple erreur d’attention dépend de certaines expériences, rencontres, ou états d’être… 

Si nous cherchons une relation, un état, une expérience, ce mouvement ne devrait pas venir d’un manque, mais de la reconnaissance préalable de cette paix et de cette joie déjà présentes. Alors chaque désir devient pure expression, pure célébration de la présence que l’on est. Chaque rencontre, chaque geste, chaque élan devient l’expansion naturelle de ce qui est déjà accompli en soi. 

Le désir personnel est artificiel et source de souffrance. L’élan impersonnel est naturel et une prolongation fluide de la complétude. 


lundi 24 novembre 2025

Le karma yoga au quotidien : vivre concrètement l’action sans acteur !

 


Dans la Bhagavad Gita, Krishna enseigne à Arjuna que l’action doit être accomplie sans appropriation intérieure. Tu as droit à l’action, mais jamais à ses fruits. L’action n’est pas rejetée, mais elle doit être libérée du désir personnel d’obtenir ou d’éviter. On agit parce que l’action naît d’elle-même dans la situation présente. Le résultat ne nous appartient pas. Le sentiment d’être l’auteur ne nous appartient pas davantage. L’action se fait, mais le faiseur imaginé disparaît. Krishna dit aussi, dans le verset IV.18, que le plus sage des hommes est celui qui voit l’action dans l’inaction et l’inaction dans l’action, montrant qu’au cœur de toute action se trouve une immobilité silencieuse, et qu’au cœur de cette immobilité se trouve un mouvement qui ne dépend de personne.


Sous cette publication, quelqu’un m’a posé une question que j’entends très souvent en satsang. Elle dit ceci : « Quelle est la place de celui qui vole le fruit d’une action qu’il n’a pas exécutée, et comment se positionner alors ? » Cette question touche à une confusion fréquente dès que l’on commence à reconnaître que l’action peut être vécue sans acteur personnel. Beaucoup craignent que cette vision mène à de la passivité ou à une forme d’impuissance face aux injustices. Pourtant, aucun enseignement non duel sérieux n’a jamais prôné la résignation. La non-dualité n’invite pas à tout accepter, elle invite à voir ce qui agit vraiment.


Dans l’expérience directe, il est clair qu’il y a deux niveaux. Il y a le témoin silencieux, immobile, qui ne fait rien, qui ne change jamais. Et il y a le corps mental, cet ensemble de perceptions, d’impulsions, d’émotions et de pensées, qui agit, parle, se déplace, répond aux circonstances. Le témoin ne fait rien, le corps mental fait tout. Voir cela avec précision change complètement le rapport à l’action. L’action continue, parfois même plus efficacement qu’avant, mais la charge intérieure disparaît. Ce n’est pas l’action qui fatigue, c’est la croyance illusoire d’être celui qui agit.



La confusion naît quand on croit que reconnaître l’immobilité du témoin implique l’inaction dans le monde. C’est l’inverse. Plus le centre est immobile, plus l’action périphérique est libre, ajustée, précise. L’absence d’auteur intérieur n’entraîne jamais l’absence d’action. Elle enlève seulement la crispation autour du résultat, la peur de perdre, l’avidité de gagner, la volonté d’avoir raison ou le besoin d’être reconnu.


C’est ici que la notion d’allègement devient cruciale. Enlightenment, qui signifie en anglais “illumination”, utilise le mot light, qui veut à la fois dire lumière et légèreté. L’illumination est en réalité un allègement. On s’allège de la croyance d’être un acteur personnel, et en s’allégeant ainsi, on cesse de s’infliger la double peine, qui consiste à agir tout en résistant intérieurement à ce qui est. Résister intérieurement tout en essayant de faire quelque chose revient à vouloir avancer en gardant le frein à main tiré. La moitié de l’énergie part dans la lutte contre les circonstances, l’autre moitié dans l’effort pour répondre à la situation. Quand la résistance tombe, l’action devient simple, directe, disponible. On découvre que la fatigue venait moins de l’action que de l’histoire intérieure qu’on y ajoutait.


Dans un cas d’injustice, comme lorsqu’une personne s’approprie le fruit du travail d’une autre, cette clarté n’invite pas à se résigner. La non-dualité ne demande jamais d’accepter l’inacceptable. Elle enlève seulement l’implication personnelle excessive qui brouille la perception. On peut rectifier une injustice sans haine, poser une limite sans drame, parler fermement sans colère. La paix intérieure n’est pas une neutralité molle. C’est un recul naturel qui donne à l’action plus de précision.




Dans ma vie quotidienne, cette vision s’incarne de manière très concrète. Avec mes trois enfants, par exemple, les situations sont souvent intenses. Quand l’un d’eux traverse une frustration ou une colère, si je suis contracté, si je veux que la situation se calme pour mon confort, ma réponse devient rigide ou mécanique. L’autorité naturelle se transforme en autoritarisme. Mais lorsque je me replace dans ce témoin silencieux et disponible, la réponse émerge d’elle-même. Parfois il s’agit d’accompagner une émotion sans rien dire, parfois d’offrir une présence calme, parfois de maintenir une limite claire. La réponse juste n’est jamais fabriquée mentalement. Elle apparaît, et souvent de façon spontanée et de manière surprenante. Le rôle de “père” auquel j’ai pu momentanément m’identifier repasse immédiatement à l’arrière-plan, et quelque chose de plus simple agit.


À l’Opéra de Paris (où je travaille en tant qu’artiste des chœurs), où les répétitions sont parfois  rythmées par le stress, les remarques rapides, les ajustements incessants, cette reconnaissance de ma vraie nature impersonnelle, et la pratique quotidienne du « karma yoga ( le yoga de l’action sans acteur) a transformé ma manière de travailler et de vivre en collectivité. Chaque fois que je me suis momentanément identifié au rôle, la moindre critique est devenue une atteinte personnelle. Quand l’identification tombe, il reste tout simplement une attention ouverte, qui ne sais rien, qui ne veut rien et qui ne possède rien. Je rectifie une note, j’aide un collègue en difficulté, je réponds à un chef de chœur énervé ou à un chef de chant frustré  (répetiteur pianiste) sans y ajouter de tension intérieure. Le travail devient plus précis et paradoxalement tellement plus léger. Il n’y a plus un acteur (un corps) contracté, il y a tout simplement une action qui se fait. 

Et, confidence pour confidence, si j’ai pu continuer durant 35 ans à mon poste de ténor 2 dans les chœurs de l’Opera de Paris, c’est probablement grâce à cette vie quotidienne en vision sans tête depuis 2012 qui a été une bénédiction et aussi un soulagement incroyable au quotidien. 


En réalité, l’action sans acteur décrit quelque chose de très simple. C’est voir que le corps mental est agi par des causes innombrables. Il ne choisit pas ses pensées, il ne choisit pas ses impulsions, il ne choisit même pas ses élans les plus altruistes ou les plus agressifs. Il est agi par la vie, par l’histoire, par l’instant. Dans la vision sans tête, cela devient évident. Il n’y a personne au centre, seulement une ouverture d’où tout apparaît et disparaît. Et dans cette ouverture, l’action se déroule sans possesseur. On fait ce qui doit être fait, mais on ne porte plus la charge illusoire d’être celui qui le fait. C’est cela que signifie l’action sans acteur et qui dans la Baghavad Gita est exprimé par la phrase : « Le plus sage des hommes est celui qui vit l’action dans l’inaction et l’inaction dans l’action ». Il y a action mais pas le sentiment d’être l’auteur personnel de l’action. 


Vivre ainsi ne rend pas faible ou inconscient. Dans mon expérience de vie professionnelle, familiale et citoyenne, cela rend juste mes pensées plus incisives et l’action de ce corps-mental-ci  plus net. 

Cela permet de dire non sans violence, de dire oui sans attachement, de voir une injustice sans en faire une affaire personnelle, de protéger quand il le faut, de parler quand c’est nécessaire, de se retirer quand rien ne doit être fait. La vision sans tête n’annule pas le monde. Elle allège d’un moi séparé imaginaire. Elle rend donc la vie plus simple, plus humaine, et plus directe aussi. C’est du simple bon sens, mais qui va tellement à l’encontre de nos habitudes mentales et de fonctionnement. 


Si j’ai voulu publier ce dialogue, c’est parce qu’il éclaire une confusion fréquente dans les premières étapes de la reconnaissance. Beaucoup sentent qu’au cœur de l’expérience il n’y a pas de faiseur, mais ils ne savent plus comment vivre extérieurement. Ils oscillent entre passivité et réaction. Ils croient que la non-dualité exige une forme d’indifférence. Elle demande seulement une lucidité tranquille. L’action vient ensuite, seule, quand elle doit venir.


La non-dualité ne demande jamais d’accepter l’inacceptable. Elle dit simplement de ne pas chercher la paix dans le résultat. La paix est déjà là, en amont de l’action. Et c’est depuis cette paix que l’on agit le mieux. L’action devient plus claire, plus ajustée, moins contaminée par la peur ou la colère. Et c’est depuis cet espace de paix que l’on agit au mieux, toute chose étant égale par ailleurs.


samedi 22 novembre 2025

Tarot et non dualité, développement personnel et réalisation impersonnelle

 


Depuis mes derniers articles sur le karma et sur l’impossibilité de trouver, dans l’expérience directe, une entité séparée qui pourrait s’incarner ou se réincarner, de nombreuses discussions ont vu le jour sur Facebook. Parmi elles, un échange m’a particulièrement intéressé, parce qu’il met en lumière une confusion que je rencontre souvent, aussi bien chez des personnes engagées dans le développement personnel que chez celles qui s’intéressent à la réalisation impersonnelle.

Le développement personnel peut être une exploration très riche. Il permet de mieux comprendre le personnage, d’apaiser certains conflits intérieurs, d’ouvrir des chemins de transformation et d’expression. Le Tarot, par exemple, peut jouer ce rôle de miroir symbolique, un livre vivant qui nous renvoie nos dynamiques profondes, nos peurs, nos élans, nos ombres. Rien de tout cela n’est méprisé ici, bien au contraire. Ce sont des approches utiles, parfois belles, parfois nécessaires.

Mais il existe un autre niveau, celui qui ne concerne plus l’histoire du personnage ni ses métamorphoses, mais la source même depuis laquelle toute expérience apparaît. Si l’on cherche la paix durable, la joie qui ne dépend de rien, ou la vérité de ce que nous sommes réellement, aucun travail sur la personnalité ne peut suffire. Ce travail peut améliorer le vécu relatif, mais il ne touche pas ce qui ne naît ni ne disparaît. Pour cela, il faut s’ouvrir à la réalisation impersonnelle, à la reconnaissance directe de notre véritable nature, qui n’est pas une construction psychologique, mais la présence claire et inconditionnée qui connaît toutes les expériences.

C’est précisément ce point qui suscite tant de questions. Certains pensent que s’ouvrir à cette dimension impersonnelle revient à nier la personne, à rejeter le personnage, ou à mépriser son histoire. D’autres imaginent que la réalisation et le développement personnel s’opposent. Rien n’est plus éloigné de ce que j’en fais l’expérience. Ils ne s’opposent pas. Ils se situent simplement sur deux plans différents. L’un appartient au domaine du changement, de l’évolution, du devenir. L’autre appartient à ce qui ne change pas, à ce qui demeure identique au milieu de tous les changements.

L’échange ci-dessous est né d’une de ces interrogations. Il touche à la question de l’humilité devant ce que nous ne pouvons pas connaître conceptuellement, à la tentation de croire en plusieurs incarnations comme si une entité stable se déplaçait de vie en vie, et à l’importance de revenir toujours à ce que l’expérience directe nous montre réellement. J’ai choisi de le partager ici parce qu’il peut éclairer la lanterne de ceux qui se situent à l’intersection du développement personnel et de la quête de la vérité. Il montre que l’un ne remplace pas l’autre, mais que seule la réalisation impersonnelle peut conduire à la paix profonde que nous cherchons parfois à travers mille chemins.

Voici donc cet échange, dans l’espoir qu’il clarifie un point essentiel : il n’y a pas à choisir entre améliorer la forme ou reconnaître la source. Les deux peuvent coexister, mais seule la reconnaissance de la source apporte ce qui ne passe pas.

Commentaire de Valérie :

Le Tarot est ce livre merveilleux de la vie qui a cela de comique qu’il se réécrit sans cesse et n’a jamais de fin. Chaque être en donne une définition, une perception, et chacune est toujours si riche d’enseignement. Merci pour ce partage. Par contre, je ne comprends pas pourquoi l’être humain s’évertue à parler de choses auxquelles il n’a pas accès. Comment affirmer que nous avons plusieurs incarnations, qu’il n’y a pas d’évolution à proprement parler d’une incarnation à l’autre etc. Ayons au moins l’humilité de dire qu’il s’agit d’hypothèses.

Ma réponse :

Merci pour ton message Valérie. Je suis très touché par ce que tu dis du Tarot, parce que je partage cette intuition profonde. Le Tarot peut fonctionner comme un miroir vivant, une manière symbolique et poétique d’explorer les mouvements subtils de nos identités, de nos peurs, de nos élans, de nos zones d’ombre. C’est un outil précieux pour éclairer les mécaniques du personnage et comprendre comment l’esprit se construit et se raconte. À ce niveau, c’est un véritable art de connaissance de soi.

Mais il existe, selon moi, une autre profondeur, celle qui ne concerne plus les figures ni les archétypes, mais la source même depuis laquelle toute perception surgit. Et c’est là que la métaphore de Ramana Maharshi est si juste. Comme on se sert d’une épine pour retirer une autre épine, puis que l’on laisse tomber les deux, on peut se servir de concepts pour défaire les concepts qui nous enferment. Il ne s’agit jamais d’établir un nouveau système ou de figer des croyances, mais simplement d’enlever ce qui obscurcit la vision.

Concernant les incarnations, tu poses une question essentielle. Comment affirmer que nous avons plusieurs vies, ou qu’il existe une évolution d’une incarnation à l’autre. Tu as raison d’appeler à l’humilité, car tout ce que l’on pense savoir sur l’après ne repose souvent que sur des narrations culturelles très anciennes et sur des projections. Et pourtant ce n’est pas par théorie que j’en parle, mais depuis l’expérience directe, ici et maintenant. Quand je regarde vraiment, je ne trouve jamais l’entité séparée que certaines traditions postulent comme voyageant de forme en forme. Je vois des pensées, des élans, des émotions, des mémoires, des formes qui apparaissent et disparaissent. Mais ce qui connaît ces apparitions n’a pas la forme de ce qu’il perçoit. Ce connaissant n’est jamais né et ne se déplace pas. Il est simplement là, immobile et silencieux, précédant toutes les histoires.

Et c’est seulement après avoir mené l’investigation jusqu’au bout qu’il devient évident qu’aucune entité fixe n’a jamais été trouvée. Non pas parce que l’on adopte une théorie, mais parce que l’on cesse enfin de projeter ce qui n’apparaît pas dans l’expérience directe. Dès lors, toutes les hypothèses sur les vies successives peuvent être entendues comme des métaphores utiles pour certains, mais jamais comme des réalités établies. Elles appartiennent à l’imaginaire spirituel, pas à la vision claire.

Pour moi, la vraie paix naît de cette reconnaissance. Le Tarot peut ouvrir des portes et nous aider à comprendre la structure de nos masques, mais il arrive un moment où l’on est appelé à regarder plus profondément, vers ce qui ne bouge jamais. Ce qui demeure identique au milieu de tous les tirages, de toutes les histoires et de toutes les incarnations supposées. C’est là que réside le cœur de ce que nous cherchons.

Et ce non-savoir que je découvre en moi, lorsque je m’en remets à cette présence qui ne pense pas et ne prétend rien, est précisément ce que Maître Eckhart appelait le royaume. Il disait que l’on ne peut entrer dans ce royaume que lorsque l’on ne sait rien, lorsque l’on ne veut rien et lorsque l’on ne possède rien. Cette humilité n’est pas un effort moral, c’est un dépouillement naturel qui accompagne la vision claire.

Au fond, tous ces échanges que nous avons ne servent qu’à cela. Ils grattent doucement les couches de prétention à savoir, ils dégonflent les certitudes, ils nous rapprochent de ce silence immense où l’esprit cesse d’inventer des mondes pour simplement reconnaître ce qui est déjà là. C’est dans ce non-savoir vivant et ouvert que tout s’éclaire.


La Vision Sans Tête est une voie inclusive

 


Ces derniers jours, à la suite de plusieurs articles et de quelques photos en vision sans tête publiées sur Facebook, un échange intéressant s’est ouvert. Dans ces photos, le doigt pointe vers l’ouverture même d’où chacun voit, et le corps de celui qui prend la photo est inclus dans l’image. Pour certains, cette esthétique peut donner l’impression que je cherche à opposer un grand Soi au petit soi, comme s’il fallait effacer le personnage pour le remplacer par une conscience impersonnelle. C’est une idée qui revient souvent et qui ne correspond en rien à ce que j’en fais l’expérience. Elle revient surtout chez ceux qui n’ont pas encore fait l’expérience directe de la vision sans tête, ce qui peut conduire à projeter sur cette approche des intentions qui ne sont pas les miennes.

Le personnage apparaît bel et bien. Il apparaît dans le miroir, dans les photos, dans les vidéos, dans les pensées. Il apparaît, mais toujours là-bas, en périphérie, comme une forme parmi d’autres. Au centre, ici, demeure l’espace clair et ouvert, vivant et sans forme, qui ne disparaît jamais. Voir cela ne supprime rien et n’exclut rien. Cela révèle simplement le lieu réel d’où nous voyons. La vision sans tête ne nie pas le moi personnel et ne cherche pas à l’effacer. Elle montre au contraire qu’il est accueilli dans cet espace, qu’il en est une expression vivante, comme une vague est expression de l’océan ou comme l’image est expression de l’écran. Rien n’est séparé. Rien n’est sacrifié. Et c’est pour cette raison que je la vis comme une voie de l’amour, car elle montre concrètement que ce qui apparaît n’a jamais été en dehors de ce que nous sommes.

Voici donc l’échange tel qu’il a eu lieu.

Commentaire de Pierre :

Dan Speerschneider en accord sur plein de tes affirmations, mais non tu ne captes toujours pas là où je te mets en doute. Je ne parle nulle part d’incarnation ou de réincarnation comme des actes d’une identité absolue qui entre dans un corps. Je parle de la manifestation de ce que nous sommes là maintenant, celle que tu dénigres sans t’en rendre compte. Que tu le veuilles ou non tu divises, tu considères incessamment la dualité comme une opposition à la non-dualité. Tout cela est binaire, avec ces images récurrentes de pieds dans tes illustrations symboliques qui incitent à faire disparaître la tête et l’esprit, incitant par là à éliminer un je pour laisser place à un soi comme s’il s’agissait de deux choses séparées. Ce serait bien que tu ailles voir parfois ce que je publie à ce sujet sur ma page, comme je le fais sur la tienne, ou d’aller voir mes posts sur facebook.com/rajamayayoga.

Ma première réponse

Je lis ce que tu écris, mais tu continues de m’attribuer une position qui n’est pas la mienne. Je ne dénigre pas la manifestation et je ne sépare rien du tout. Je décris simplement l’expérience directe où il n’y a jamais deux réalités, jamais un je à éliminer pour faire place à un Soi, jamais deux plans en opposition. Si tu veux absolument interpréter mes mots comme une division, c’est ta lecture, pas mon propos. La dualité n’est pas l’ennemie de la non-dualité, elle en est une apparence. Quant à mes images, elles ne cherchent pas à effacer quoi que ce soit, encore moins l’esprit, mais à pointer vers ce qui voit déjà. Merci pour ta suggestion d’aller voir tes publications, mais ce que je partage ne s’enracine pas dans une théorie, seulement dans l’évidence immédiate de ce qui est là.

Ma seconde réponse, plus complète

Pierre, tu continues de projeter sur mes mots quelque chose qui ne correspond absolument pas à ce que je partage ni à ce que j’expérimente depuis des décennies. Tu lis mes images comme si elles opposaient un je et un soi, comme si elles voulaient effacer la tête ou l’esprit, comme si elles dénigraient la manifestation. C’est exactement l’inverse. Et je vais être clair : tu parles de la vision sans tête sans jamais en avoir fait l’expérience. Car si tu l’avais faite, tu verrais immédiatement qu’elle ne supprime rien, ne nie rien, ne sépare rien. Elle révèle simplement que l’espace clair et ouvert qui perçoit n’est pas localisé derrière un visage imaginaire, mais ici, exactement ici, à zéro centimètre. Et cet espace est inséparable de ce qu’il perçoit. Comme la vague n’est pas séparée de l’eau, les formes et les couleurs ne sont jamais séparées de la transparence qui les accueille.

Tu sembles croire qu’en reconnaissant cet espace, on élimine un je pour lui substituer un soi. C’est une idée. Dans l’expérience directe, il n’y a rien à éliminer, rien à remplacer, rien à rejeter. Ce qui disparaît, c’est seulement l’illusion d’un centre localisé. Le personnage apparaît, bien sûr qu’il apparaît, mais où apparaît-il ? Dans le miroir, dans les photos, dans les vidéos, dans les pensées, toujours là-bas, en périphérie, jamais au centre. Au centre, il y a l’espace, simplement. Ce n’est pas une négation, c’est une évidence.

À partir de là, on prend soin du personnage comme on prend soin de tout ce qui apparaît, comme on prend soin d’un apparent autre, d’un enfant, d’une forêt, d’un animal, de la terre. Le personnage n’est pas séparé de l’espace, il en est une expression, comme les vagues sont expression de l’océan et les images expression de l’écran. Rien n’est exclu. Rien n’est en dehors. Et c’est précisément cela l’amour.

C’est aussi pour cela que j’insiste sur le double mouvement dont parlait Nisargadatta Maharaj. Quand je vois que je ne suis rien, c’est la sagesse. Quand je vois que je suis tout, c’est l’amour. Jésus dit exactement la même chose. Honorer le Père, c’est honorer la source, l’ouverture sans forme. Aimer son prochain comme soi-même, c’est reconnaître que tout ce qui apparaît est soi-même. Une seule vision, deux accents.

Pierre, je te le dis vraiment sans animosité. Tu interprètes mes mots comme s’ils séparaient, alors qu’ils pointent vers l’unité. Viens simplement faire l’expérience. Viens dimanche à 19h30 au satsang. En quelques minutes, tout ce malentendu peut disparaître. Il suffit de voir ce qui regarde, plutôt que de commenter l’image dans laquelle cela apparaît.


Satsang en musique avec Béla Bartok

 


https://youtu.be/QElT9KD4uX8?si=OELrEEAncPNGC7SA

La Musique pour cordes, percussion et célesta de Béla Bartók (que vous pouvez retrouver avec le lien ci-dessus) est l’un de ces chefs-d’œuvre absolus qui ne vieillissent pas. Dès les premières mesures du premier mouvement, quelque chose s’ouvre. Les lignes de cordes se poursuivent, se croisent, se cherchent, comme si chaque voix dessinait une direction différente et, dans le même geste, ramenait l’écoute vers un centre invisible. On croit suivre une mélodie, puis une autre, puis une autre encore, et l’attention se déploie dans toutes les directions à la fois. Cette dispersion subtile apparente finit pourtant par révéler autre chose, de plus vaste, de plus silencieux : ce fond immobile dans lequel toute musique apparaît.

C’est là que la dimension non duelle devient palpable. On croit écouter une œuvre, mais c’est l’écoute elle-même qui se découvre. Les textures de Bartók, les tensions discrètes, les passages au seuil du murmure, ne font que mettre en lumière ce silence atemporel qui précède chaque son et les accueille tous sans préférence. Cette musique et certaines autres ont parfois ce délicieux pouvoir : elle nous ramène au cœur de nous-même, là où rien n’a jamais été blessé, là où rien n’a jamais bougé d’un iota, même au plus intense des crescendos.

Le génie de Bartók est de créer une architecture sonore d’une complexité presque mathématique, tout en ouvrant un espace intérieur d’une grande simplicité. On reconnaît alors que les sons naissent, vibrent, disparaissent, mais que l’écoute qui les perçoit demeure intacte, inchangée, silencieusement présente. Et c’est peut-être cela, au fond, que cette œuvre nous offre : un chemin qui passe par la densité des formes pour révéler l’absence de forme qui les porte.

Je suis tellement en accord avec cette phrase de Nietzsche : « Sans la musique la vie serait une erreur »

Belle écoute à toi sœur et frère de lumière 

Amor Fati 

jeudi 20 novembre 2025

Expérience de mort imminente et réalisation atemporelle

 

Une photo de moi lors de la réincarnation en moine orthodoxe 

C’est peut-être mon Karma que de révéler l’absence de Karma ?

Plaisanterie à part d epuis quelques jours, après mes trois articles consacrés au karma et à la question de l’incarnation, j’ai reçu de nombreux commentaires sur Facebook ou par mail, parfois enthousiastes, parfois interloqués, parfois même un peu agacés. Certains me disent que je pinaille, que je coupe les cheveux en quatre, que je vais trop loin. Mais je ne le pense pas. Ce que j’observe surtout, c’est à quel point ces sujets touchent des zones sensibles, où se mêlent beaucoup de croyances, de projections, et parfois des interprétations héritées de ce qu’on appelle le milieu spirituel contemporain.


Je tente, peut-être naïvement, mais avec sincérité, de dépatouiller l’être de toutes ces couches de croyances New Age qui, au fil du temps, se sont déposées comme une gangue autour de la vraie connaissance. Derrière ces conceptions très poétiques parfois, très séduisantes aussi, il y a souvent une vision cosmogonique qui n’a plus grand-chose à voir avec l’expérience directe de la conscience. Et je sens profondément qu’il est important de clarifier tout cela, non pas pour avoir raison, mais pour permettre d’éviter certaines confusions qui rendent l’accès au réel inutilement compliqué.


L’article que je partage ici est composé du commentaire d’un ami Facebook à propos de mon deuxième article sur le karma et l’absence d’incarnation individuelle, suivi de ma réponse détaillée. Je le publie parce que cet échange illustre très bien les malentendus récurrents autour de cette question fondamentale. Et si je peux, par ce genre de dialogue, offrir un peu plus de clarté à ceux qui naviguent encore entre plusieurs visions du monde, alors le temps que j’y consacre est plus que justifié.


Commentaire d’un ami FB à mon article du 17/11/25 intitulé : « Incarnation ou pas incarnation. 


« Les expériences hors du corps par les plus expérimentés ou via les EMI montrent clairement qu'il y a une entité individuelle et qu'elle est le tout en simultanée. C'est les deux en même temps. 

Dans l'agenda de la Mère d'Auroville  du 2 août 1961, avec un vocabulaire différent la question de l'individualité est abordée par Satprem.

Je n'ai pas assez de recul de par mes expériences en OBE pour l'affirmer, mais les plus expérimentés que j'ai étudié sont clairs là-dessus.

Autrement dit il y aurait une entité qui se réincarne, on est pas fondu dans un magma, il y a un continuum. 

Je pense que dans notre conscience incarnée on simplifie souvent les choses car on a souvent pas la mémoire. »


Ma réponse à ce commentaire : 


Merci pour ton message. Avant de te répondre, je voudrais préciser quelque chose d’important. J’officie comme accompagnant psycho-corporel non-duel depuis 1998, et pendant plus de vingt-cinq ans, j’ai guidé des milliers de séances où j’ai vu apparaître toutes sortes de phénomènes non conventionnels, parfois très subtils, parfois puissants, parfois déroutants. J’ai moi-même vécu des centaines d’expériences intérieures d’une grande intensité. Tout cela, je le connais bien, mais je n’en parle presque jamais, par respect pour ce que j’appelle la réalité ultime. Toutes ces manifestations appartiennent au domaine de l’expérience, et une expérience, par nature, apparaît et disparaît. Elle a un commencement, une durée, une fin. Elle se déroule dans un espace perçu.


Ce que je suis, ultimement, n’est pas une expérience. C’est ce qui rend toute expérience possible. C’est intemporel, hors de l’espace et du temps. L’espace et le temps apparaissent en ce que je suis, et non l’inverse. Et pour être très honnête, parmi toutes les expériences impressionnantes ou extraordinaires que j’ai pu connaître ou accompagner, il n’y en a aucune qui égale l’étonnement d’être l’éternelle et infinie présence. Cet étonnement-là dépasse tout le reste.


À partir de cette clarification, je comprends profondément ce que tu exprimes concernant les OBE, les EMI et les explorations subtiles. Beaucoup témoignent effectivement d’une continuité de l’individualité sur un autre plan, d’une sorte de cohérence qui se poursuit d’un niveau de perception à un autre. Je ne remets pas en question ces vécus : ils existent, et ils ont leur légitimité dans le champ phénoménal. Ils appartiennent à ce que l’on pourrait appeler le plan subtil de l’expérience, tout comme les rêves lucides, les visions, les états méditatifs profonds.


Mais même les expériences hors du corps les plus saisissantes apparaissent à quelqu’un. Elles sont perçues. Elles évoluent. Elles disparaissent. Elles ne témoignent pas de ce que je suis en vérité, mais de ce que je peux percevoir. L’entité subtile qui semble se déplacer ou continuer d’exister dans ces plans n’est encore qu’un contenu apparaissant dans la conscience.


C’est là le cœur de la non-dualité :

être l’entité subtile perçue n’est pas être la conscience qui perçoit.

Même une continuité subtile reste un phénomène. Ce n’est pas l’absolu.


C’est pour cela que je dis souvent, en plaisantant, mais c’est une plaisanterie très profonde, que la seule EMI véritable que je connaisse est celle de Ramana Maharshi, à seize ans. Parce que sa “mort” intérieure ne l’a pas projeté dans un autre plan, ni dans une entité subtile en déplacement. Elle l’a reconduit directement à sa nature intemporelle. Ce n’était pas une continuité personnelle, mais la fin radicale de la personne. La révélation de l’unique présence.


Satprem, La Mère, Sri Aurobindo parlent de continuité psychique, de corps subtils, d’évolution. Je respecte pleinement ces visions, et elles décrivent des niveaux réels du manifesté. Mais même chez eux, l’individualité subtile n’est pas l’ultime. Elle est un instrument. Elle apparaît. Elle évolue. Elle n’est pas la source.


La non-dualité ne nie pas ces expériences. Elle les replace simplement dans leur juste contexte : celui de phénomènes subtils, riches, parfois précieux, mais encore conditionnés. Ce qui est ultime, ce que je suis réellement, ne se déplace pas, ne migre pas, n’a pas de mémoire propre, n’entre dans aucun corps et n’en sort jamais.


Tout apparaît en cela.

Et cela ne bouge jamais.

THERAPIE PSYCOCORPORELLE NON DUELLE



THERAPIE PSYCOCORPORELLE NON DUELLE

 

La non dualité est une forme de spiritualité. Etre ici et maintenant. Si nous souffrons, ou bien, quelque chose se produit que nous ne voulons pas ou inversement. C’est la structure de la souffrance. C’est la focalisation soit de l’attachement ou de l’aversion du moment présent. La Thérapie Psychocorporelle Non Duelle s’oriente vers la déconstruction de cette structure.

 

QUE CE PASSE T-IL ICI ET MAINTENANT ? Elle ne concerne pas le passé. Seulement l’influence du passé sur le moment présent. La réalité se crée au travers de nos croyances. Que se passe t il si nous sortons de notre forte identification à ce que nous pensons ?

 

La question n’est peut être plus de savoir comment satisfaire nos besoins, mais plutôt de trouver un espace où nous sommes sans besoin. Il n’y a rien à faire, rien à savoir. La thérapie non duelle ne nous invite pas à chercher de nouvelles compréhensions, mais simplement à changer d’état de conscience. Nous sommes déjà ce à quoi nous aspirons.

 

Un accompagnement en douceur par la maïeutique (accoucher ce qui est voilé) du dialogue, du rêve éveillé libre, du toucher ou de la simple présence au souffle et aux rythmes contrariés pour passer du niveau où vous «pensez la vie» à la fréquence où vous «ressentez la vie». 

 

• Tirons le fil d’Ariane de nos émotions bloquées et de nos croyances erronées pour redécouvrir un état naturel (conscience non duelle) où nous n’entrons plus en conflit avec la réalité.

 

• Il s’agit donc ici d’une thérapie non conventionnelle où l’accent est mis sur l’écoute sans personne pour éclairer nos zones de résistance et les nœuds émotionnels afin d’apprendre à les écouter de façon équanime jusqu’à leur résorption dans le silence.

 

   

 

Et réaliser que nous sommes ce silence impersonnel