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dimanche 8 juin 2025

L’esprit de la Pentecôte selon Jean Tauler


Ce matin j’ai redécouvert et médité quelques extraits du magnifique sermon de Jean Tauler - contemporain et disciple de maître Eckhart - sur la symbolique de la Pentecôte qui peut résonner pour chacun de nous. Et j’ai à cœur de te partager cette résonance en mots.  Je précise que je n’ai reçu aucune éducation chrétienne et que je n’ai aucune habileté particulière à commenter le sens de la Pentecôte dans la perspective chrétienne autre que ce qui m’a été fortuitement révélé un jour de Pentecôte le 1er juin 1998 en lisant un texte de Krishnamurti où tout a soudainement été vu par et en tant qu’une seule et même Lumière impersonnelle et que j’ai alors nommé « Intelligence ». 

 La fête chrétienne de la Pentecôte commémore la descente de l’Esprit Saint sur les apôtres, réunis après la résurrection du Christ. Dans le récit biblique, cet événement marque un tournant : les disciples, jusque-là enfermés dans la peur, deviennent capables de parler avec clarté, force et ouverture intérieure. C’est souvent interprété comme le début d’une vie spirituelle fondée non sur la loi, mais sur l’inspiration vivante.

Mais cette descente de l’Esprit n’appartient pas seulement au passé. Elle désigne aussi un processus intérieur, qui peut se produire en chaque UN, ici maintenant. Nous sommes tous, d’une certaine manière, ce lieu possible où la Conscience peut se révéler où quelque chose de plus vaste que l’on croit être peut se réaliser. Dans une perspective non duelle la Pentecôte ne pointe pas vers une croyance extérieure, mais vers une disponibilité intérieure.

C’est dans ce sens que Jean Tauler, moine dominicain du XIVe siècle, a parlé de l’action de l’Esprit dans l’âme humaine. Dans de sermon, il décrit comment l’Esprit commence toujours par un travail de dépouillement, avant de pouvoir se donner. Il ne s’adresse pas à notre personnalité, mais à ce qui, en nous, est prêt à s’effacer.

Tauler écrit :

« Le Saint-Esprit a deux mouvements. D’abord il vide, ensuite il remplit, dans la mesure où il trouve du vide. »

Ce vide ne désigne pas une perte de sens ou une absence, mais un désencombrement de tout ce qui prend de la place inutilement : les attentes, les opinions figées, l’attachement à l’image de soi. Il ne s’agit pas de s’appauvrir, mais de se rendre disponible. Ce vide est la condition d’un accueil réel. 

Maître Eckhart disait dans le sermon 5B  : « La moindre pensée que j’ai est plus grande que Dieu. Pourquoi ? Parce qu’elle empêche Dieu d’entrer en moi en plénitude. Quand la pensée sort Dieu entre… »

Jean Tauler dit ensuite :

« Plus tu as été vidé en vérité, plus tu reçois. Moins il reste de toi, plus tu reçois de lui. »

Ce qui est mis en question ici, c’est la centralité du “moi” dans notre expérience. Tant que nous restons identifiés à une figure mentale de nous-mêmes, à une volonté séparée, l’espace reste comme fermé. Mais dès que cette identification cesse, quelque chose peut emplir l’espace. En réalité ce n’est pas un ajout, mais une simple reconnaissance. Ce qui était là depuis toujours peut enfin se révéler.

Tauler parle ensuite de ceux qu’il appelle les « vrais pauvres d’esprit » :

« Le Saint-Esprit les remplit et souffle avec force dans l’âme. »

Cela fait écho au célèbre sermon de Maître Eckhart, dans lequel il dit :

« Celui-là est un pauvre en esprit qui ne veut rien, ne sait rien, ne possède rien. »

Ce triple détachement — du vouloir, du savoir et de la possession — est au cœur de ce que les traditions non-duelles appellent l’abandon ou le non-savoir. Il ne s’agit pas d’un état à cultiver, mais d’une absence de saisie. Une ouverture silencieuse à ce qui est. Ce non savoir se révélé directement par une reconnaissance. 

Tauler précise encore :

« Recevez directement de Dieu tout ce qui vous arrive, d’où que cela vienne, de l’intérieur ou de l’extérieur. »

Dans cette perspective, rien n’est exclu. Chaque situation, chaque émotion, chaque événement peut être vu comme un moment de reconnaissance — pourvu qu’on cesse de juger, d’analyser ou de s’en protéger. Tout devient occasion de s’ouvrir davantage à ce qui est déjà là, silencieusement.

Enfin, il conclut par un rappel essentiel :

« Ce ne sont pas les œuvres qui te sont un obstacle, mais le désordre que tu y mets. Mets de l’ordre, cherche Dieu dans toutes tes œuvres, et rien d’autre. »

L’action n’est pas en elle-même un problème. C’est l’appropriation de l’action, le besoin de réussir, d’être reconnu, d’atteindre quelque chose, qui la charge de tension. Lorsqu’on agit sans s’identifier à l’acteur, l’action devient fluide. Elle est simple, claire, sans attente. Elle n’est plus un moyen d’affirmer un moi, mais une expression naturelle de l’être.

Ce que Jean Tauler décrit ici n’est pas une voie réservée à quelques contemplatifs. Il parle d’une possibilité humaine fondamentale : celle de s’ouvrir à ce qui, en nous, ne dépend de rien. L’Esprit, au fond, ne vient pas de l’extérieur. Il se révèle lorsque nous cessons de vouloir être quelqu’un.

Et le souffle de l’Esprit saint, aujourd’hui encore, attend juste qu’un peu d’espace s’ouvre pour passer.

Quand ? Maintenant 

Où ? Ici 

Que la paix et la joie de l’Esprit Saint t’emplisse frère et sœur de lumière…

———

Voici l’extrait du sermon de la Pentecôte de Jean Tauler que j’ai médité :

Le Saint-Esprit a deux mouvements. Premièrement il vide, deuxièmement : il remplit le vide dans la mesure où il en trouve.

Plus tu auras été vidé en vérité, plus aussi tu recevras ; moins il reste de toi, plus tu reçois de lui. Amour-propre, esprit-propre, volonté-propre, tu dois te dégager de tout cela.

Voilà les vrais pauvres d’esprit, le Saint-Esprit les remplit et souffle avec force dans l’âme.

Recevez directement de Dieu tout ce qui vous arrive, d’où que cela vienne, de l’intérieur et de l’extérieur et quoi que ce soit ; ne le prenez que comme un moyen par lequel Dieu veut vous préparer pour lui-même.

Ce ne sont pas les œuvres qui te sont un obstacle, mais le désordre que tu y mets. Écarte le désordre et cherche Dieu dans toutes tes œuvres, et rien d’autre.


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