Le mot « péché » vient du latin peccatum, qui signifie littéralement « rater la cible » ou « faire une erreur ». C’est une image simple et puissante : le péché n’est pas seulement une faute morale, c’est surtout un écart, un raté par rapport à un but, une norme.
Dans la Grèce antique, il y avait le mot amartia qui veut dire la même chose, « manquer la cible », comme au tir à l’arc. Ce mot désignait souvent une erreur humaine, souvent involontaire, avec des conséquences parfois graves.
Du coup, que ce soit en latin ou en grec, le péché, c’est d’abord une maladresse, un manquement - pas forcément une transgression volontaire.
Dans la perspective non-duelle, on peut dire que le péché, c’est tout ce qui ne vient pas de la Présence, c’est-à-dire de ce qui est vraiment vivant en nous, ici et maintenant. C’est une réaction automatique à l’oubli de notre vraie nature. C’est la mémoire et la croyance au “moi séparé” qui provoquent ce mouvement.
Le péché, alors, c’est la tentative maladroite d’alléger ce sentiment de manque, ce vide qui n’existe que dans l’illusion de la séparation, en l’emplissant d’expériences, de sensations, d’états émotionnels, d’aventures, de rencontres ….
Comme disait Nisargadatta Maharaj :
« L’ignorance est la racine de toutes les souffrances, et ce qu’on appelle péché n’est que le reflet de cette ignorance. »
Jean-Yves Leloup rappelle aussi que :
« Le péché est une blessure dans la relation à Dieu, mais Dieu est aussi la source du pardon et de la guérison. »
Plutôt que de se condamner, la non-dualité invite à accueillir ce qui est, même nos erreurs et nos manques, sans les juger ni s’y attacher.
Ramana Maharshi disait :
« Ne vous accrochez ni au péché ni à la vertu. Restez dans le silence et observez. La vraie purification vient de la connaissance de soi. »
Le péché devient alors un signal, un appel à revenir à soi, à la conscience immuable et aimante qui est notre vraie nature.
Le péché, c’est rater la cible, s’écarter de notre vraie nature. Dans la conscience non-duelle, c’est la conséquence de l’oubli de qui nous sommes vraiment - la présence unique, vaste et libre.
Mais cette compréhension nous ouvre aussi à la compassion envers nous-mêmes et les autres. Chacun fait cette expérience. Et la guérison ne vient pas de la condamnation, mais du retour à l’Être, ici et maintenant.
Comme le souligne Jean-Yves Leloup, en lisant Philon d’Alexandrie, la véritable guérison est une réorientation du désir, une thérapie de l’Être, un retour profond et vivant vers ce que nous sommes réellement, au-delà des apparences et des souffrances.
Ainsi, le péché, loin d’être un jugement définitif ou une condamnation, se révèle être un appel silencieux - un frémissement au cœur de l’oubli, une invitation à revenir à la source. C’est dans cet écart, dans ce « manquer la cible », que la grâce peut surgir, nous rappelant que notre véritable nature est cette présence immuable, vaste et infinie.
La guérison véritable, ne réside pas dans la fuite ou la lutte contre nos erreurs, mais dans une réorientation du désir. Ce désir qui se tourne vers l’Être, qui s’éveille vers la source même de tout désir, qui s’éveille à la lumière intérieure, et qui trouve enfin la paix au-delà des formes et des apparences.
C’est ce retour vivant à l’Être, cette reconnexion profonde à ce que nous sommes vraiment, qui dissout les illusions du « moi » séparé et ouvre le chemin vers la liberté, la douceur, et l’amour inconditionnel.
Dans ce mouvement, chaque pas, même le plus fragile, devient une danse sacrée, un témoignage de la lumière qui jamais ne faillit - celle de notre essence profonde, éternelle et aimante.

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